Henri : Bonjour, Kavus, et merci d’accorder cet entretien à Neoprog.
Kavus Torabi : Merci pour l’intérêt.
Henri : Voilà un mois qu’est sorti The Unravelling, comment te sens-tu dans cette période de promotion, juste avant les 4 premiers concerts de présentation de l’album en Angleterre ?
Kavus Torabi : Je suis excité à l’idée de jouer les nouvelles chansons en public. Nous avons juste fini les pré-répétitions et nous allons commencer les répétitions avec le groupe au complet dans quelques jours. Nous allons essayer de jouer quasiment tout l’album.
Henri : Buried Alone: Tales of Crushing Defeat (2009) était plutôt un album solo sur lequel jouaient déjà des musiciens encore présents sur The Unravelling. Penses-tu que Knifeworld soit aujourd’hui vraiment un groupe ? En tout cas, l’est-il pour toi ?
Kavus Torabi : Absolument. Depuis la sortie du premier album, Melanie, Chloe et Emmett ont fait partie du véritable noyau du groupe, nous avons changé la section rythmique et avons ajouté une paire de cuivres il y a deux ans, mais cela ressemble beaucoup plus à un groupe maintenant.
Henri : On reconnait, bien entendu, ta façon d’écrire des chansons sur cet album, néanmoins, le style est moins pop indie, et beaucoup plus progressif psychédélique, voire jazzy, ce qu’on avait déjà entrevu sur Clairvoyant Fortnight (EP, 2012). Partages-tu cette opinion ? Si oui, est-ce intentionnel ou le fruit du travail avec les sept autres musiciens du groupe ?
Kavus Torabi : Probablement un peu des deux. Je pense en termes d’instrumentation. Avoir un Fender Rhodes et trois cuivres donnera toujours ce genre d’associations, je veux dire, composer pour huit musiciens signifie que nous pouvons être bien plus ambitieux au niveau des arrangements. Je pense qu'il y a toujours eu beaucoup de cela dans ma musique mais elle est beaucoup plus répartie entre ces différents instruments maintenant.
Henri : Je trouve, du coup, que ton jeu de guitare est plus libre, tout en étant plus concentré, me faisant parfois penser à celui de Frank Zappa…
Kavus Torabi : Merci. Je suppose qu'il y a quelques similitudes dans certains de mes phrasés. Je suis un grand fan de Zappa mais plus de ses compositions et de ses arrangements que de son jeu de guitare en lui-même. Maintenant, l’influence doit avoir suivi quelque peu ce cheminement. Dans ma tête, je pense que je sonne comme Adrian Smith d’Iron Maiden. Je voulais jouer comme lui quand j’étais gosse !
Henri : Bien des parallèles peuvent être effectués également avec Gong, groupe que tu as rejoint en 2013…
Kavus Torabi : D’accord. J’ai aimé Gong pendant des années. Travailler avec Gong est un processus très différent de celui de Knifeworld, mais Daevid Allen est un homme vraiment inspirant. Sa musique m’a vraiment touché quand j’étais plus jeune et maintenant je trouve qu’il me touche en tant qu’ami. Il est remarquable.
Henri : Entre Gong, Guapo et Knifeword, tu t’y retrouves ?
Kavus Torabi : Bonne question. Je n’y arrive pas... c’est l’idée. Si je me laisse aller à l’introspection, mon esprit peut souvent errer dans des endroits très désagréables et je peux me comporter d’une manière que je n’aime pas le moins du monde. Être continuellement occupé est la meilleure manière de garder ça à distance. J’aime faire de la musique, ça a été une source constante de bonheur pour moi, aussi loin que je me rappelle. Aussi longtemps que je suis occupé à faire le genre de musique que j’aime, tout ce qui gravite autour trouve sa place et je ne commence pas à agir comme un abruti.
Henri : Pour en revenir à The Unravelling, outre la production extraordinaire, on sent beaucoup d’idées et de la place laissée à l’expression des autres musiciens, notamment aux chanteurs et chanteuses. Comment fait-on pour organiser le travail d’un octuor ? Tu gères cela de façon démocratique ou tyrannique ?
Kavus Torabi : Bon, tyrannique c’est un peu beaucoup, mais j’écris et j’arrange à peu près toute la musique, oui. Chacun dans le groupe est impliqué dans d’autres projets et la plupart des musiciens sont de redoutables compositeurs à part entière. Cela signifie que personne n’est offensé de la manière dont Knifeworld fonctionne. Chacun le fait parce qu’il aime la musique que nous faisons et nous aimons jouer les uns avec les autres. Je tends à écrire avec chaque musicien particulier à l’esprit et chacun est libre de faire des suggestions quant à la manière d’appréhender les morceaux.
Henri : Melanie Woods est une excellente chanteuse dont la voix s’harmonise très bien avec la tienne mais, Franchement, lui arrive-t-il de sourire aussi (rires) ?
Kavus Torabi : Si tu avais entendu son très fort rire, tu souhaiterais ne jamais avoir posé la question.
Henri : Cette manière mystérieuse et ambiguë de vous comporter se ressent également dans vos vidéos. Avez-vous le même genre d’attitude sur scène ?
Kavus Torabi : Parfois, si je suis dans le truc. La plupart du temps, je ne peux pas me regarder dans les vidéos. Je n'aime pas être gêné. Sur scène, je me sens beaucoup plus à l’aise parce que j’ai beaucoup plus d’expérience. Je ne peux pas simplement démarrer comme un acteur, bien que, si je ne suis pas dans le truc, je ne puisse pas vraiment le cacher. Aussi, si vous nous voyez et que je deviens fou sur scène, il y a de fortes chances que je sois vraiment en train d’apprécier le show.
J’ai pris l’habitude de faire des vidéos. Elles sont un mal nécessaire, je suppose. Bon nombre de gens ne peuvent pas écouter de musique sans qu’elle soit accompagnée d’images. La seule occasion où beaucoup de gens écoutent de la musique orchestrale, par exemple, c’est quand elle est dans un film.
Henri : Knifeworld a désormais suffisamment de morceaux pour tourner en première partie. As-tu le projet de venir jouer bientôt en France ?
Kavus Torabi : Eh bien, nous avons déjà donné des concerts en tête d’affiche ces dernières années au Royaume-Uni, mais oui, naturellement, nous aimerions venir en France. Nous préparons les choses à l’heure actuelle. Peut-être à la fin de cette année, mais sans aucun doute l’an prochain.
Henri : Pour conclure, qu’aimerais-tu dire aux amateurs français de prog pour qu’ils écoutent Knifeworld et viennent vous voir en concert ?
Kavus Torabi : C’est difficile. Je sais que nous ne correspondons pas à tout le monde, mais je pense aussi qu’il n’y a pas beaucoup de groupes qui sonnent comme nous. Vous ne nous trouverez pas ennuyeux, ça c’est sûr !
Henri : Merci beaucoup, Kavus !
Kavus Torabi : De rien, merci.
Rédigé par Henri le 28/08/2014