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Interview de Defying le 12/04/2017
Interview de Piotr, chanteur de Defying, en début d'année 2017.



Jean-Christophe : Bonjour, bonne année ! Merci de nous accorder un peu de votre temps, comment allez vous ?

Piotr : Merci, bonne année également ! Nous allons bien merci !

Piotr

Jean-Christophe : Vous venez de Pologne et jouez du métal. Comment décririez-vous votre musique ? Du post métal progressif sombre et mélancolique ?

Piotr : La musique de Defying provient de nombreuses inspirations. A la base j'ynous jouons du métal, même si nous usons de nombreux de ses sous genres. Tu peux y trouver du doom, du post, du prog métal et un petit peu de sludge également. Quelque soit l’étiquette que tu choisisses pour nous décrire, elle est juste. Nous ne portons pas une grande attention à définir notre musique; nous faisons juste notre boulot.

Jean-Christophe : En écoutant votre musique, nous avons une impression de paroles très sombres. De quoi parlez-vous sur votre dernier EP, The Splinter of Light We Misread par exemple ?

Piotr : Les paroles doivent être en harmonie avec la musique et refléter sa nature. C'est seulement ainsi qu'une composition peut créer un tout et toucher. Nous nous sommes inspirés de la biographie de Joy Division (principalement les relations entre Ian et son épouse) pour écrire les textes de notre dernier EP, et du travail de poètes polonais d’après-guerre, tout particulièrement les poèmes de Rafał Wojaczek et Andrzej Bursa. Le thème de Nexus Artificial tourne autour des astronautes ainsi que de l’évolution de l’espèce humaine provoquée par d’autres civilisations. Pour le coup, c’est le film Promotheus qui nous a inspiré.

Cette fois nous voulions essayer autre chose, quelque chose de plus “terre à terre”. Nous avons voulu un EP “sale” et la première chose fut de travailler sur la reprise de Joy Division que nous avions déjà joué à la fin de nos concerts. À l'époque, nous pensions utiliser l’histoire tragique d'Ian Curtis comme une source d'inspiration. J’y ai ajouté des poèmes de Rafał Wojaczek. Ses textes, surtout les plus anciens, sont imprégnés de relations troubles, pour ne pas dire douloureuses. D’un côté il y a le “je t’aime”, de l’autre une aura de saleté organique qui plane partout. Et bien sûr la mort, la mort présente sous toutes les formes, pratiquement dans chaque strophe.

Jean-Christophe : L’enregistrement studio sonne vraiment très soft pour du métal, même quand il y a du growl, alors comment sonne Defying en live ?

Piotr : Cette légèreté provient peut-être des conditions dans lesquelles nous avons enregistré les morceaux. Le premier album fut entièrement enregistré à la maison pour des raisons financières. "The Splinter of Light We misread" a été entièrement enregistré en studio, tu as peut-être besoin de pousser le volume à fond ? (rires). En live nous jouons avec le son, nous accordons très bas, donc Defying sonne vraiment très puissant. Parfois il n’est pas facile de restituer ce son en studio. J’ai cette même impression quand j’écoute d’autres groupes en concert.

Jean-Christophe : Quelles sont vos influences principales en musique, et qui écoute quoi dans le groupe ?

Piotr : Difficile de répondre parce que chacun d’entre nous écoute des musiques légèrement différentes, même si nous partageons souvent les même goûts. Nous aimons tous le progressif des 70’s, principalement Opeth, Blindead, Riverside... Ces derniers plaisent particulièrement à Tomek (notre batteur). Moi je suis un vieux metalhead, nourri de trash, de death et de black metal; le post-metal et les trucs du genre sont arrivés plus tard dans ma vie. Alors que Pwel, le bassiste, s’aventure dans des styles dans lesquels moi et Tomek ne sommes guère familiers. Le mélange de tout ça sonne pas mal.

Jean-Christophe : Pourquoi du growl au lieu d’une voix claire (question stupide de proghead) ? Et pourquoi avoir choisi de chanter en anglais plutôt qu’en polonais ?

Piotr : e growle parce que je ne sais pas chanter (rires). L’anglais est plus mélodique que le polonais et plus facile à chanter (growl). Le polonais est plein de voyelles rebelles, ce qui donne souvent un enregistrement qui crachote. En outre, c’est une langue sifflante et pleine de bruissements. Chanter en polonais est bien sûr possible, comme le prouvent de nombreux groupes de notre pays. Je ne dis pas “non” à des titres en polonais; peut-être que l’on composera quelque chose dans notre langue maternelle un jour, mais pour l’instant, nous restons en anglais.

Jean-Christophe : Certains disent que le prog est mort, quel est ton impression à ce sujet en Pologne ?

Piotr : Personnellement, je ne m'intéresse pas trop à ça. Les gens ont l’habitude de dire que tout est mort, le rock le métal et tous leurs sous genres. Et en même temps, nous avons toujours plein de groupes de par le monde qui créent de très bons albums. Je pense que c'est pourquoi ils ne se soucient pas de telles discussions, mais juste de faire leur travail. La nationalité n'a pas d'importance ici. La scène métal polonaise est maintenant plus forte que jamais. N'importe qui, qui s'intéresse à la musique peut le voir. Il en va de même pour la musique prog, il suffit de regarder les albums récents de Riverside, de Blindead ou de Votum.

Jean-Christophe : Pour Nexus Artificial, vous avez réalisé un packaging fait maison. Est-ce une manière de lutter contre la montée de la musique digitale ?

Piotr : Nous préférons le support physique, surtout pour les albums dans lesquels nous avons mis beaucoup d’énergie. Le concept de l’album est alors plus complet et cohérent. En fait, "Nexus Artificial" a été produit de manière industrielle, les copies fait main concernent seulement l’EP "The Splinter of Light We misread”. Pour être honnête, il n’y a pas vraiment d’idéologie là dedans; nous avons juste limité les coûts de production. "The Splinter" est sous la forme d'un artbook complexe avec de nombreuses illustrations. Nous nous sommes bien éclatés en studio et sur la production. Nous n’avons pas fait appel à un industriel, c'est pourquoi nous avons pu réaliser chaque emballage de CD à la main. Tous ont été assemblés par la petite amie de notre batteur.

Piotr

Jean-Christophe : Comment travaillez-vous sur un album ? Est-ce que tout le monde se pointe avec ses idées dans une sorte de joyeuse anarchie musicale, ou existe-t-il un plan dès le début du processus ?

Piotr : Il n’y a pas d’objectif fixé. La musique ce sont des émotions et on ne peut pas planifier ça. La façon de composer des morceaux varie. Des fois c’est de l’improvisation pendant les recherches que nous enregistrons, et d’autres fois, l’un d’entre nous arrive avec quelque chose. Il arrive aussi que nous travaillions sur les sons chez l’un d’entre nous. Defying n’a pas de leader, nous travaillons tous ensemble.

Jean-Christophe : Les sonorités acoustiques semblent importantes dans votre musique: guitare, violoncelle. Ça n’est pas trop métal ça, pourquoi ces choix ?

Piotr : Dès le début Defying était censé créer une musique plutôt éclectique. Nous nous basons sur le métal, mais nous l’enrichissons avec les thèmes externes au genre. Nous aimons jouer avec le son et sa forme. Ce n'est pas que nous voulions insérer de tels thèmes à tout prix. Si nous estimons que dans une partie donnée il devrait y avoir un instrument supplémentaire, nous l'insérons. Si cela nous plait, nous le laissons là. Sinon, nous l’enlevons. L’équilibre doit être conservé et surtout il faut que cela sonne comme dans nos têtes.

Jean-Christophe : Le groupe a commencé il y a neuf ans, mais on ne peut trouver qu’un seul album de vous, Nexus Artificial, datant de 2014, et votre dernier EP, The Splinter of Light We Misread de 2016. Mais avant cela, vous avez sorti deux démos. Où sont-elles, on peut les écouter ?

Piotr : En réalité nous avons enregistré trois démos : “Phial Of Prayers” (2009), “Defying” (2010), and “Portraits” (2012). Elles étaient disponibles sur le Net en écoute, mais nous les avons retiré à la sortie de "Nexus Artificial". Principalement parce qu'elles étaient de mauvaise qualité et étaient différentes de ce que nous jouons maintenant. Elles avaient été enregistrées avec d’anciens membres et possédaient une orientation plus rock progressif. Nous voulions que les gens portent leur attention sur "Nexus" parce que c'est le vrai visage du groupe. Nous avons encore quelques copies, donc si quelqu'un est vraiment intéressé, il ou elle peut nous écrire.

Jean-Christophe : Y-a-t’il une chance que l’on vous écoute en live en France un jour ?

Piotr : Dernièrement, Rafal a quitté le groupe et nous sommes en train de chercher un guitariste donc les concerts ne sont pas au programme, tout particulièrement à l’étranger. Peut-être que l’on viendra dans le futur, j’aimerais bien.

Jean-Christophe : Quels sont vos projets maintenant ? Un nouvel album ?

Piotr : Nous avons déjà une idée et nous y travaillons doucement pendant les répétitions. Et puis nous mettrons à jour notre site Web et notre profil Facebook.

Merci pour l'interview. Salutations de Pologne.

Rédigé par Jean-Christophe le 12/04/2017