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Live report du 18/07/2015 - Night of The Prog - jour 2 - partie 4
22:47 (=> je ne sais plus, en tout cas tard dans la nuit…). Fish.

Il fait nuit noire, la prise de notes devient assez acrobatique. Je vais griffonner sur la page au hasard, sans regarder, en dehors des lignes, on verra si j’arrive à me relire plus tard. Qui ne connait pas Derek William Dick? (Levez la main, et avec un truc électronique allumé s’il vous plaît, je ne vois plus rien). Je vais passer la carrière du géant écossais, je suppose que l’extrême majorité de ceux qui vont lire ces lignes n’ont pas besoin d’une piqure de rappel le concernant. L’organisation avait communiqué depuis longtemps que Fish ferait dans son intégralité, pour le 30e anniversaire de l’album, et surtout pour la dernière fois, l’interprétation de Misplaced Childhood. Les 30 ans de Misplaced Childhood pour les 10 ans de la Loreley, les comptes sont ronds et alléchants. Ceux qui ont une progéniture pourront dire à leurs petits-enfants ‘J’y étais !’, pour autant que ceux-ci soient encore intéressés par ces conversations dinosau-musicales d’un autre âge.
Fish, je l’ai vu chez Paulette lors de son Moveable Feast Tour en Novembre 2013 dernier. Les titres de ses albums solos étaient bien passés, mais la voix n’était pas vraiment au rendez-vous lors de l’interprétation du medley de Marillion. J’en étais ressorti un peu déçu. Ce n’est pas dévoiler un secret que de dire que Fish a eu quelques soucis de voix ces derniers temps, et je dois avouer que je suis un peu inquiet sur sa performance vocale. Que cela soit bien clair, cela n’enlève rien au personnage et à sa carrière. Les hommes de scène restent des humains, avec des hauts et des bas, et le corps peut aussi dire qu’il en a assez lorsqu’il est très sollicité. Rien de plus normal.

NOTP 2015 Loreley Fish


Ils sont quatre sur scène, bien regroupés, Fish au milieu du demi-cercle créé par ses musiciens, son célèbre et fidèle écharpe-chèche blanc et noir sur ses épaules, sa démarche légèrement dégingandée qui le fait reconnaître entre tous. Un écran a été disposé en hauteur derrière la scène afin de projeter des images pendant le concert. Les gradins sont pleins à craquer, l’image de l’album Suits est projetée, le show commence avec le premier titre. Tout le monde se met debout spontanément, Fish demande au public de taper dans ses mains. Je ne vois qu’une forêt de bras en l’air qui frappent en cadence, rehaussés çà et là par les petites bulles de lumières des smartphones ou appareils photo tenus à bout de bras. C’est impressionnant. Ce premier titre me rassure sur l’état de la voix du chanteur. La musique s’arrête et l’écossais prend la parole. Il parle des journalistes qui demandent souvent à l'écossais lors des interviews s’il veut un whisky, leur répondant : ’No thanks, I need water, I am a Fish’. Il s’interroge alors sur la langue à utiliser pour s’adresser au public : anglais ? Allemand ? Ce sera les deux en alternance. Il évoque le Maroc, où il était il y a peu de temps, de la guerre, et des morts civils, innocentes victimes qui n’ont rien demandé. Ses chansons sont alors ‘for innoncents in all over the planet’. Lui qui avait eu des mots très touchants aussi chez Paulette ce soir-là sur le dérèglement de la planète par les hommes, et le sacrifice de soldats pour la liberté d’autres, nous le retrouvons bien là. L’image de la pochette Sunsets On Empire est projetée alors que la musique continue. Dans la nuit, nous baignons tous dans une chaude lumière, l’endroit est un grand chaudron bouillonnant de rouge, de bleu, de jaune. Nous sommes des papillons de nuit attirés et voletant autour de de cette scène lumineuse, captivés par les paroles et le charisme de ce double-mètre écossais. L’étoile de 13th Star’ est projetée sur l’écran. Fish balaie de sa main l’amphithéâtre en demandant le silence. Instantanément, comme une vague de mutisme se répandant sur la foule, tout le monde se tait. Ma surprise est totale, je suis abasourdi. Le charisme de cet homme est hallucinant. Silence total de l’audience dans les gradins, nous sommes suspendus au prochain geste du frontman qui a réussi à répandre instantanément le mutisme dans un amphithéâtre plein à craquer. Ce moment se niche instantanément dans un petit creux de ma mémoire. Je ne me souviens plus trop ce qui se passe ensuite, mais nous avons maintenant devant nous un bédouin chantant avec sur la tête un chèche, qui va s’assoir quelques minutes au pied de la batterie, boire un peu pendant que ses musiciens continuent à jouer. Le monologue reprend, en allemand ou en anglais je ne sais plus, en tout cas je suis impressionné par son niveau en allemand parlé. Il se met à la place d’enfants obligés de rester terrés dans une cave -sûrement quelque part au Moyen-Orient- et revient plus tard sur sa carrière. Nous sommes bien sûr toujours debout depuis le début du spectacle. Depuis toutes ces années sur scène, il nous explique qu’il n’a pas vu le temps passer, il évoque son corps qui lui fait de plus en plus mal.

NOTP 2015 Loreley Fish


Après les titres de ses différents albums solo, nous voilà arrivés au moment tant attendu : Misplaced Childhood dans son intégralité, et pour la dernière fois, ici à la Loreley. L’album commencé, je ne me rends seulement vraiment compte de ce qui nous réunit tous ici ce soir. J’avais 15 ans quand Misplaced Childhood est sorti, nous verrions le petit garçon à la pie n’importe où que nous le reconnaitrions instantanément. C’est très émouvant et nostalgique de tous être là ce soir, et, quoi qu’on en pense, c'est un moment unique. Cet homme parle en filigrane de mon adolescence, de mes rêves, de mes doutes, et c’est, je pense, la même chose pour une bonne partie des gens autour de moi. Eh bien je suis loin d’avoir été le seul avec ce petit prince pour m’accompagner à mes côtés … Cet album de Marillion est bien autre chose qu’un simple album de musique. De ce moment je ne prends pas beaucoup de notes, je veux être dans l’instant présent. J’en retiens un ‘Childhood !’ répété en chœur et qui résonne dans l’amphithéâtre. Sur l’écran sont projetées les photos de Fish à cette époque, et de ce garçon à la pochette, que je ne pensais pas être calqué sur un personnage vivant. L’album fini (et peut-être un premier rappel, je ne me souviens plus) la musique continue avec 'Market Square Heroes', et bien sûr là encore tout le monde tape dans ses mains. Une révérence au public, un ‘Tschüss !’, et le poisson écossais quitte la scène d’un coup de nageoire. Bien sûr un (second) rappel est demandé par le public, Fish revient sur scène, veut que cette soirée soit unique, veut voir tout le monde danser dans les gradins. ‘The Company' est joué, Fish amorce alors au cours de ce dernier titre un pas de danse celtique, et invite tout le monde à danser … nous dansons dans les gradins pour ce titre final, qui clôture le concert d’une sacrée personnalité du paysage progressif.

Et alors, me direz-vous, rien sur la petite troupe de l'homme des Highlands et la musique jouée ? Eh bien non. Le fait est que Fish écrase de sa présence la scène, éclipsant un peu tout le reste. Il a bien fait la présentation de sa troupe et de ses musiciens à la fin du concert, mais je n’ai ni retenu ni noté les noms. J’espère que vous ne m’en tiendrez pas rigueur. J’ai cru comprendre que pour une partie des français ce soir-là, l’interprétation musicale de cet album n’a pas été à la hauteur de l’événement. Personnellement je n’ai pas particulièrement focalisé sur cet aspect, je laisserai chacun juge. Je dirai juste que, comme évoqué précédemment, j’étais resté très mitigé sur la qualité de la voix de Fish, et ce concert a été une bonne surprise à ce niveau, cela m’a suffi. Pour les différents aspects sur la musique jouée ce soir, je suis sûr que vous trouverez d’autres ressources sur le net pour vous faire une opinion. Pour moi la vraie question est : peut-on reproduire, avec une équipe différente, donc des compétences et des sensibilités différentes, ou, en tout respect, avec des personnes qui ont pris la marque du temps, la magie d’un moment de musique qui a été composé il y a 30 ans ? Mais alors comment fait un orchestre symphonique, parce que là on ne parle pas de 30 ans …. Je ferai une lapalissade en disant que la réussite d’un concert dépend de beaucoup de paramètres, notamment (et non exhaustivement) des personnes qui composent l’équipe à ce moment précis, ainsi que du travail effectué en amont.

La fête est finie pour aujourd’hui, il est temps d’aller se coucher. Ce concert restera pour moi un grand moment, un hommage rendu à ce personnage à la carrière bien remplie et au caractère bien trempé qu'est Fish.

NOTP 2015 Loreley Fish


Setlist:
Pipeline
Feast of Consequences
Long Cold Day
The Perception of Johnny Punter
Misplaced Childhood
Pseudo Silk Kimono (Marillion song)
Kayleigh (Marillion song)
Lavender (Marillion song)
Bitter Suite (Marillion song)
Heart of Lothian (Marillion song)
Waterhole (Expresso Bongo) (Marillion song)
Lords of the Backstage (Marillion song)
Blind Curve (Marillion song)
Childhoods End? (Marillion song)
White Feather (Marillion song)
Market Square Heroes (Marillion song)

Encore:
The Company

Photos Laurent Regnard et Stéphane Gallay

Rédigé par : Laurent