Titres
Davide Moscato [chanteur,clavier], Giovanni Pastorino [clavier], Martin Grice [flute,saxophone], Fabio Zuffanti [bassiste], Simone Amodeo [guitariste], Paolo Tixi [batteur]
Bon, cette fois-ci je suis parti de rien. Une simple écoute, un rapide ressenti et hop, c’est emballé, on chronique. Pari un peu risqué, d’autant plus qu’habituellement je tape dans les guitares lourdes, dans la rage et l’exaspération plutôt que dans la légèreté et l’optimisme mais bon, sur notre chemin de vie, nous sommes tous amenés à changer, non ? Mesmerising s’est donc présenté à moi comme une alternative nouvelle, un truc inédit qui, certes, n’aura pas redéfini intégralement mes codes mais aura contribué à les rafraîchir. Un peu de douceur dans mon monde de brutes …
Ce groupe italien de rock progressif repose beaucoup sur la voix de son principal compositeur Davide Moscato, musicien et chanteur autodidacte. Un artiste qui n’en est pas à son premier coup d’essai puisqu’il s’agit là de son troisième album. Accompagné notamment de Martin Grice (Delirium) au saxophone et à la flûte et de Fabio Zuffanti (Finisterre) à la basse, Davide développe sur The Clutters Storyteller son propre univers. Un premier constat plutôt enthousiasmant : s’engouffrer dans une nouvelle dimension a toujours quelque chose de jouissif. Alors qu’allons-nous découvrir dans les couloirs de ses créations ? On navigue tout du long de ces dix compositions dans des atmosphères romantiques, émouvantes, tristes ou joyeuses. Dès l’introduction, Davide nous ramollit avec une mélodie assez féérique qui débouche habilement sur ‘My Dream’, une jolie ballade à laquelle la section rythmique confère des couleurs seventies. Sur ce titre, le vocaliste nous caresse de sa voix de fausset en allant chercher des notes aigües et étirées sur les fins de couplet. Original est le premier mot qui nous vient à l’esprit. Seul petit bémol, il n’était pas forcément judicieux de durcir le morceau avec ce riff basique et dégressif qui soutient un des solos de guitare au milieu de la composition. Reste qu’il s’agit là d’une belle carte de visite pour celui qui décide d’aller plus loin dans l’écoute de cet album. ‘My Dream’ n’a pas été choisi pour rien comme single pour promouvoir The Clutters Storyteller.
Au rayon des pures balades, citons également ‘False Reality’, un piano-voix émouvant, enveloppé délicatement par la flûte de Martin Grice. Ici, tout n’est que douceur, sensibilité et modération. Idéal pour conclure une soirée romantique … Le chant de Davide est d’une élégance fragile, proche de la rupture parfois mais l’interprétation est sans faille. ‘In A Different Dimension’ complète parfaitement l’ambiance posée par ‘False Reality’ et redynamise tranquillement (oui c’est possible !) le propos pour déboucher sur le progressif et plus rythmé ‘The Man Who’s Sleeping’. La facette progressive de Mesmerising se dévoile sur ce titre finalement assez court (quatre minutes au compteur) mais riche, un poil énigmatique avec ses arpèges de guitare façon ondes marines et son pont aérien au synthé nous rappelant l’univers de Marillion. Respect à l’artiste pour cette faculté à composer et enchaîner les ambiances. Le solo de saxophone, assez déjanté mais mélodique est proposé au bon moment. Bien que le rendu de cet instrument m’ait toujours agacé au plus haut point, j’ai finalement trouvé ça assez… cool. Oui, c’est ça, cool. D’autant plus que Martin Grice n’est pas dans la démonstration mais propose des parties inspirées (à la flûte également, très présente sur cet album) au service des compositions.
‘Ballad Of A Creepy Night’ et ‘Slave Of Your Shell’ sont deux morceaux diablement efficaces. Deux ou trois écoutes suffisent pour que les mélodies s’inscrivent en vous. Le premier est encore une fois très complet. Davide semble proposer un titre immédiat mais finalement y injecte un peu de diversité et ouvre des chemins inattendus. En prenant par la main les auditeurs, il leur fait découvrir en délicatesse les codes de la musique progressive et rend le genre accessible. ‘Slave Of Your Shell’, sur lequel la voix de Davide se fait plus nasillarde, s’écoutera plutôt sur la route des vacances. Un de mes titres favoris.
Les autres compositions demanderont un peu plus de concentration mais une fois encore, on ne peut qu’être ébahi devant le travail effectué sur l’accroche des mélodies. Une cassure orientale et un solo queenesque vous attendent sur ‘Underground’, et je ne vous parle pas des parties de flûte sages ou folles qui parsèment cette piste. Sur ‘The Vortex’, porté par la basse de Fabio Zuffanti, on songe un temps à Paolo Conte ou à un opéra rock, mais rapidement on vire vers d’autres sphères. Davide déborde d’idées qu’il sait judicieusement associer. Constat qui se vérifiera à nouveau sur la composition finale, ‘The Last Time You Called My Name’, avec son solo de synthé qui explose en plein milieu et s’offre à nous tel un feu d’artifice venant clore ce spectacle auditif.
Ames sensibles, surtout ne vous abstenez pas ! Cet album transpire de mélodies sensuelles et de passages prog bien sentis portés par des musiciens qui prennent un plaisir évident à exprimer leur talent. Juste pour la musique, rien que pour la musique et pour ce qu’elle transmet... Ne vous arrêtez pas au côté prévisible du début de chaque chanson, les surprises sont nombreuses. The Clutters Storysteller occupera une place spéciale dans ma cdthèque essentiellement axée sur le metal, une anomalie séduisante, fascinante. Une fleur perdue au milieu d’un champ de mines …