Titres
Formation en 2011
Return from the Grave
Italie (2011)
Genre : heavy/stoner/doom
Kilo : basse
Jack : batterie
Sparta : guitares
Semenz : chant
Discographie :
Return from the Grave, EP, autoproduction, 2011
The Rebirth from the Last Breath, autoproduction, 2012
Gates of Nowhere, Argonauta Records, 2 juin 2014
Je dois bien avouer que le nom du groupe et la pochette m’ont un peu inquiété au premier abord : allais-je souffrir des oreilles avec un groupe de doom spectral au chant caverneux éructant et à la double pédale de grosse caisse parkinsonienne ?
C’est donc avec une certaine fébrilité que j’entrouvrais ces portes de nulle part…
Et ça démarre fort, dans le macabre, avec un “Intro” instrumental à vous faire monter la fièvre : pluie et vent vous entraînent vers des arpèges de guitares passés au mixeur d’une lenteur accablante et calculée…
“Words in Words” (voir la vidéo) attaque tel un des premiers Black Sabbath, les Vénitiens ne sont pas des dentellières de Calais, c’est sûr : le son est puissant, crado à souhait, trituré et dégoulinant, la voix bourrée d’écho sort d’outre-tombe (ce qui semble normal) et les instrumentistes poussent les volumes et plaques impitoyablement les mesures !
Le son, analogique, fait son effet, et on sent la puissance bien dosée du mastering de Richard Whittaker (FxGroup Studios, Londres), qui a travaillé pour Saint Vitus, The Who, Black Sabbath et les Rolling Stones…
Et puisqu’on est supposé chroniquer du progressif, “Center of the Will” déboule illico pour nous montrer que les gaillards ont quelques références dans le domaine, enchaînant breaks, contretemps et autres syncopes autour d’une basse puissante et d’une batterie bien en place avant d’enfiler une ultime chevauchée où Sparta s’amuse à mélanger les guitares.
Voilà, la cadre est posé : point d’exhibition ou de démonstration, le propos étant tendu, oscillant gravement entre histoires d’horreur et sens caché de la vie et de la mort, nos joyeux lurons nous la jouent en puissance et en intensité, la technique se mettant au service du son (loin des tendances mégalo de nombre de gangs métalo-progressifs). Le parti pris analogique ne dessert pas l’ambiance, bien au contraire, et le groupe reste moderne dans son actualisation d’un hard psychédélique issu des seventies.
“The Rage of Rays” nous propulse sur un rythme plus soutenu proche du stoner sur la base d’un riff simple amenant un ralentissement puis un break appuyé et coda sur l’ensemble. C’est envoûtant, captivant et bien amené, avec de belles interventions mélodiques de la basse de Kilo pour finir par un entrelacement des guitares, du vrai stoner prog.
“Uncovered Fate” démarre sur le rythme de la batterie endiablée de Jack. Les guitares ont encore la part belle, et le chant de Semenz se fait quelque peu plus varié, malgré le côté doom plus prononcé du morceau, avec tout de même un final en clin d’œil au « Immigrant Song » de Led Zeppelin.
Avec “River in the Sky”, on revient à un stoner accentué de psychédélisme (pour moi le plus beau morceau de l’album) où la voix de Semenz montre plus de possibilités et de sensibilité et où les instrumentistes deviennent plus subtils dans leur expression (le jeu de batterie de Jack et la basse de Kilo virevoltent tandis que les guitares de Sparta scintillent). Ce morceau à lui seul mériterait une illustration visuelle pour en accentuer la profondeur !
Ces Gates of Nowhere se referment déjà avec “Inside Human’s Soul”, considéré comme un titre bonus (alors que l’album, ce titre inclus ne fait que 36:03) et qui n’est qu’une nouvelle version du même titre présent sur The Rebirth from the Last Breath passée à la moulinette de la nouvelle production. Le morceau y gagne en puissance et en harmonie. On revient au final vers Black Sabbath et Jack lâche un jeu furieux, alors que la nouvelle masterisation donne une coloration plus vintage à l’ensemble (les guitares se croisent et les chœurs donnent de la profondeur, tandis que le chant est légèrement plus en retrait).
Pour quelqu’un qui appréhendait l’écoute de cet album, j’en ressors séduit par l’expression torturée des gars de Return from the Grave, malgré l’apparente similarité de nombreux morceaux. Leur travail, où j’attendrais encore personnellement plus d’audaces (comme sur les totales réussites que sont à mes oreilles « The Rage of Rays » et « River in the Sky ») est plus abouti et mieux mis en valeur que sur leurs deux premiers opus. Les amateurs du Black Sabbath Mark I et de stoner en ressortiront sans doute, comme moi, ravis et attentifs au futur de ce groupe.
Ah si, j’oubliais : pour pleinement apprécier cette galette, il faut la cuire à feu très fort !