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Interview de IQ le 09/01/2020
Interview de Michael Holmes du groupe IQ le 12 décembre 2019 pour la sortie de l’album Resistance.



Marc : Premièrement, j'aimerais te remercier de prendre le temps de répondre à mes questions.

Michael Holmes : Pas de problèmes...

Michael Holmes

Marc : L'album est sorti depuis quelques temps maintenant et il ne reçoit pratiquement que d'excellents avis, heureux ?

Michael Holmes : Pour être honnête, il me faut toujours un certain temps après qu'un album soit fini afin de savoir s'il est bon ou mauvais. Quand j’écris ou que je suis en studio, je suis beaucoup trop impliqué pour être objectif, il me faut plusieurs mois après sa sortie pour pouvoir enfin l’écouter avec des oreilles « neuves ».
Mais oui, il est plaisant (et rassurant) de récolter d'aussi bons avis.

Marc : Pourquoi avoir choisi Resistance comme titre du nouvel album ? Est-ce le thème général des chansons ou une déclaration concernant le rock progressif ou le groupe ?

Michael Holmes : Pour ma part, en composant pour l'album, j'avais en tête tout ce qui se passe en ce moment dans le monde. En fait, depuis quelques années, Trump, le Brexit et l'explosion de l’extrême droite pointent tous vers un désagréable retournement dans les attitudes qui font se demander pourquoi l'opinion publique a tellement évolué ! Pourquoi est-ce OK pour les gens qui nous dirigent de mentir ouvertement et de s'en tirer sans problèmes ? Nous sommes toujours prêts à nous plaindre mais au final, c'est nous qui décidons quel parti est au pouvoir. Le concept de « vérité » a été bafoué et il semble OK de mentir du moment qu'on le fait suffisamment fort et pendant suffisamment longtemps. Le racisme, la bigoterie et la xénophobie sont aujourd’hui, plus que jamais, présents en politique et nous ne faisons pas assez ce qu'il faut pour les contrer.
Ajoutons à cela le réchauffement climatique et l'apathie des gouvernements à réagir en urgence, tout le monde sait que l'on est dans une situation de crise,mais les dirigeants mondiaux sont plus inquiets à propos de leurs financements par les sociétés de combustibles fossiles ou par les différents lobbies.
Je pensais récemment qu'il est temps pour tous de se lever et de se faire entendre. On sait d’expérience que les politiciens ne commenceront à bouger que si les électeurs commencent à montrer leur colère, c'est pourquoi je soutiens a 100% le groupe Extinction Rebellion qui ne sont pas le remède, mais qui a au moins le mérite de favoriser le débat.

Michael Holmes

Marc : Quels sont donc les thèmes abordés dans les paroles de Resistance ?

Michael Holmes : Cette question est plutôt pour Peter. L’intérêt de son écriture est que chacun peut y trouver sa propre interprétation. Personnellement, je choisis d'y voir un sentiment d'impuissance, du genre, « Que peut faire une personne seule ? » et finalement une rage contre la corruption et l'apathie.

Marc : Sur Road Of Bones, vous aviez un son « heavy » qui lui donnait un côté metal progressif. Il en est de même sur Resistance, est ce un choix délibéré ?

Michael Holmes : Non, pas du tout. Comme je le dis toujours, il faut laisser les choses évoluer naturellement et espérer que le public aimera ça, sinon ça va sonner artificiel et je pense que cela se ressent toujours. Personnellement je trouve cela un peu décevant quand les artistes font ça.

Marc : Es-tu inspiré par des groupes comme Dream Theater, Fates Warning ou Threshold ou ne sont-ils tout simplement pas ton « truc » ?

Michael Holmes : Je dois dire que j'aime la plupart des choses si je les trouve intéressantes et originales, au moins dans une certaine mesure. L'important pour moi dans la musique sont la mélodie, le groove, l'intérêt peut provenir de n'importe quel genre. Je ne suis pas un grand fan de shredding pour le plaisir, je me fiche vraiment du nombre de notes qu’on peut jouer en une seconde. Parfois, cela fonctionne vraiment dans le contexte d'un morceau, mais pour moi, c'est beaucoup plus important d'entendre quelque chose qui a un peu d'âme et de groove.

Marc : Dans une des chroniques que j'ai lues (une parmi les quelques unes des moins positives), le chroniqueur disait que ce son « heavy » rendait la musique d'IQ moins intéressante, que pourrais-tu lui répondre ?

Michael Holmes : Je suppose que c'est une opinion valable, comme je l'ai dit, nous écrivons ce que l'on ressent, le reste vous appartient.

Marc : Revenons au groupe, qu'est-ce qui a changé dans le processus d’écriture depuis le départ de Martin Orford ? Y avait-il des différences fondamentales en termes de direction musicale entre lui et le reste du groupe, et pensez-vous un jour retravailler avec lui ?

Michael Holmes : La seule chose qui ait vraiment changé ces dix dernières années est que j’écris la quasi totalité de la musique moi-même. En général, nous composons chacun chez soi et envoyons des démos aux autres, ou les essayons tous ensemble directement en studio. À de très rares occasion, nous développons une idée issue d'une jam, mais la plupart du temps, les idées sont individuelles. Nous fonctionnons toujours de cette façon.
Je ne nous vois pas retravailler avec Martin. Je pense que lui comme nous avons évolué en terme d'ambition et de style musical, de plus, il règne aujourd’hui une agréable harmonie entre les membres du groupe.

Michael Holmes

Marc : J'ai eu assez souvent l'occasion de voir le groupe en live, en France mais aussi lors d'un de vos fameux 'Xmas Bash' À Londres. Si ma mémoire est bonne, je me souviens qu'à la fin d'un des concerts auxquels j'ai assisté, Peter avait dit « - nous espérons que vous avez profité du show car cela pourrait être le dernier pour nous ».
Est ce que la situation financière ou personnelle du groupe vous a déjà fait considérer de tout arrêter ?


Michael Holmes : Hmm, je ne me souviens pas avoir entendu Peter dire cela, mais je ne dis pas que cela n'est pas arrivé !
Nous sommes dans une situation confortable avec IQ dans la mesure où les concerts sont toujours rentables, je ne pense donc pas qu’il y ait pour nous une raison d’arrêter. Nous avons discuté de la fin éventuelle du groupe et nous sommes arrivé à la conclusion qu'il sera temps de tout stopper quand le public n'aura plus envie d’écouter notre musique.

Marc : Quelle est le secret de votre longévité ?

Michael Holmes : Je suppose que c'est de l’entêtement ! Le fait est que nous aimons faire ce que nous faisons et qu’il n’y a jamais vraiment eu de raisons pressantes d’arrêter de le faire. J'ai souvent pensé que nous étions en fait dans une position plutôt privilégiée dans la mesure où nous avons d'excellents retours concernant nos idées artistiques et qu'il y a encore suffisamment de monde qui veulent écouter ce que nous faisons et venir aux concerts. Il y a tellement de groupes qui aimeraient être dans cette position, et bien que je ne pense pas que nous serons jamais en tête d'affiche de grands concerts de stade, c'est toujours un vrai plaisir de pouvoir faire ce que nous faisons, d'être payés pour cela et d'y prendre toujours autant de plaisir.

Marc : Malgré les nombreuses épreuves que vous avez traversées tout au long de votre carrière, la qualité de votre musique ne cesse d'augmenter. Dirais-tu que celles-ci vous ont donné la force de vous surpasser à chaque fois ?

Michael Holmes : Aucune idée ! C'est formidable que les gens pensent que la qualité de la musique augmente tout le temps, je pense que c'est dû à notre processus de contrôle qualité qui s'avère être très strict. Une fois que vous avez sorti un album, il est là pour l'éternité, donc il doit être aussi bon que vous pouvez le faire au moment ou vous le faites.

Marc : The Road Of Bones a été un succès critique et commercial, quel est votre album qui a vendu le plus ? Pensez vous que certains albums ont étés sous-estimés ? Quel est ton album favori ?

Michael Holmes : encore une fois, je n'en ai aucune idée, Je ne connais pas les chiffres de vente, il est donc difficile d'identifier un album comme étant le meilleur vendeur. En terme de favori pour moi, cela a tendance à être la chose la plus récente que nous ayons faite juste parce que ça sonne encore frais dans ma tête. Ou alors le truc sur lequel je travaille sur le moment.

Marc : Pourquoi vous faites vous si rare en France ?

Michael Holmes : Tu veux dire en concert ? C'est simplement que nous n'avons pas beaucoup d'offres pour jouer en France. Nous allons généralement jouer partout où nous sommes demandés tant que cela fonctionne financièrement et que c'est possible en termes de temps, mais nous avons besoin des promoteurs locaux pour organiser le tout pour nous. Bien sûr, si vous connaissez des promoteurs qui souhaitent travailler avec nous…

Marc : Avez-vous déjà pensé à vous associer à Pendragon, Marillion ou à d'autres pour organiser une tournée prog européenne?

Michael Holmes : Non !

Marc : Qu'est-ce que tu écoutes ces jours-ci et qu'est-ce qui t'inspire?

Michael Holmes : Cela dépend vraiment, je peux m'inspirer de nombreuses sources (TV, films, installations artistiques, discussions ...) mais si je joue quelque chose à partir de mon iPod, cela varie selon l'humeur dans laquelle je me trouve. Pour me détendre, j'ai quelques compositeurs classiques que j'aime écouter et je suis assez fan de bandes originales de films (vous ne pouvez pas vous tromper avec un peu de Thomas Newman ou de Hans Zimmer). Ella Fitzgerald est toujours agréable à entendre (meilleure voix féminine de tous les temps!), mais si je veux quelque chose d'un peu plus excitant, je mettrai probablement un peu de transe ou de hard house.

Marc : Votre carrière est presque essentiellement européenne même si vous avez joué quelques concerts au Mexique, au Canada ou aux États-Unis. Était-ce un choix dès le début de vous concentrer sur votre public le plus proche?

Michael Holmes : Ce n'était pas tellement un choix, c'était juste plus commode. Comme je l'ai dit plus tôt, nous sommes heureux de jouer partout ou nous pouvons faire en sorte que cela fonctionne, mais il est évidemment beaucoup plus facile (et plus rapide) de jouer au Royaume-Uni ou en Europe. La plupart des membres du groupe ont des emplois de jour et des familles, donc ils n'ont pas forcément énormément de temps à consacrer aux tournées.

Marc : En regardant en arrière après toutes ces années et avec le recul, y a-t-il des choses que vous auriez faites différemment avec / pour IQ?

Michael Holmes : Nooon! Je n'ai passé que de bons moments tout au long de notre carrière. J'ai voyagé dans des endroits incroyables, joué de très bons concerts et rencontré des tas de gens merveilleux. Bien sûr, il y a eu quelques mauvaises périodes et quelques déceptions, mais personnellement, je ne changerais rien.

Marc : Qu'est IQ pour toi après toutes ces années ? Une passion brûlante ?

Michael Holmes : Je pense qu'il est plus juste de dire que la musique en général est une passion pour moi. La plupart des choses que j'écris finissent par être du matériel pour IQ, mais j'aime aussi faire d'autres choses musicalement. En fait, je travaille sur un autre album pour ‘The Lens’ en ce moment même.

Marc : Si tu devais définir IQ en une chanson, laquelle serait-elle?

Michael Holmes : Difficile à dire. Pour les dernières années, je choisirais probablement The Road of Bones, mais après près de 40 ans, il y a eu tellement de styles et de sentiments différents dans la musique du groupe ! Selon moi, il n'y a pas un morceau qui puisse définir définitivement IQ.

Marc : Tu nous a dit plus tôt que certains membres du groupe ont un travail en dehors de IQ, quels sont-ils?

Michael Holmes : En effet, le groupe ne nous permet malheureusement pas de vivre de notre musique. J'ai pu me retirer de la vie active il y a quelques années car on m'a proposé une retraite (très) anticipée et j'ai quelques biens. Les autres gars travaillent toujours à leurs emplois respectifs, soit en tant que soignants, programmeurs ou conférenciers.

Marc : Merci encore et à bientôt.

Rédigé par Marc le 09/01/2020