19:45. La longue file d'attente qui patiente dehors augure de l'affluence ce soir dans la grande salle de L'Autre Canal. La queue filiforme forme un grand J pour longer latéralement ensuite le bâtiment de côté. Impressionnant. Il s'agit de deux premières pour moi: découverte de la salle de musiques actuelles L'Autre Canal, qui vient de fêter ses 10 ans cette année, et premier concert de Marillion (eh oui !). Petit parfum de nostalgie, en une sorte de retour aux sources. Étudiant à Nancy dans les années 90, je me souviens de ce quartier, qui s'est radicalement transformé, et aussi des affiches du Terminal Export, salle de concerts connue à l'époque. Depuis il semble que de l'eau ait coulé le long des rives du canal et de la Meurthe.
La file avance heureusement très rapidement, je suis sur la liste des heureux récipiendaires du pass photo (merci Anthony), et j'apprends que nous avons tout le concert pour shooter. Quelle belle surprise (il arrive très souvent lors des concerts que la presse n'ait droit qu'à trois chansons pour prendre des photos des artistes). La salle rectangulaire est superbe, remplie comme un œuf. Une coursive en U court tout autour de la salle et permet à une partie du public surélevé de voir complètement la scène.
Après un tour dans la salle et une petite montée dans les coursives, il me faudra quelque temps pour prendre mes marques et trouver l'entrée réservée aux photographes. Deux autres photographes sont là. Je me sens dans mes petits souliers; la travée est énorme, et garnie de sièges. Je dois sûrement être dans un rêve. Un cymbalum trône devant au milieu de la scène, des plexiglas sont en place autour du set de batterie de Ian.
Encore une fois il est difficile de garder à la fois un œil dans l'objectif et de profiter entièrement du spectacle, d'en retenir les moments forts. Je vais donc m'en tenir à ce qui m'a marqué le plus, ce que j'ai ressenti.
Il y a d'abord l'écoute du public. Une foule attentive, qui ne semble être qu'un seul esprit présent devant la scène. Une écoute qui confine au recueillement notamment lors de Leavers, avec ce temps suspendu lorsque les notes de Mark flottent dans l'air, accompagnées de cette note hypnotique en écho, alors que Steve fait doucement atterrir ses notes sur ces vagues qui nous amènent proche du paradis.
Il y a ensuite Steve Rothery qui, comme à son habitude, yeux fermés et tête tournée vers le ciel semble partir régulièrement sur une autre planète pendant ses interventions constamment inspirées. Il faut dire que la set list fait la part belle aux morceaux calmes et introspectifs, ce qui n'incite pas aux grands mouvements énergiques et pleins de fougue sur scène. On sent ensuite dans Pete une énergie contenue qui ne demande qu'à exploser lorsque sa basse se balance en grands mouvements amples, alors que Mark reste aussi concentré derrière ses claviers. Ian, quant à lui, éclipsé par ses cymbales, semble jouer à cache-cache avec le public.
Un incongru 'Il est des nôtres …' braillé en entier fusera après que Steve ait bu une gorgée de bière lors d'une courte pause. Le chanteur se fendra avec patience d'un commentaire bienveillant pour dire qu'en Angleterre aussi il existe quelques chansons à boire. Le personnage qui bouge le plus est bien évidemment le front man de la formation. Son jeu de scène est un savant mélange de petites mimiques vocales et gestuelles collant superbement bien aux paroles, sans oublier quelques explosions fugaces corporelles, ses membres semblant se disloquer en une sorte de pierrot désarticulé. Les titres s'enchaînent, le temps s'envole, je me pose un instant pour savourer ‘Easter’. Ces deux heures de concert auront encore passé trop vite.
Ce sont environ 1 200 personnes qui ont fait le déplacement ce soir-là à Nancy pour écouter la bande à Monsieur Hogarth, pour une tournée qui ne compte que deux dates en France. Joli score. Joli succès pour Arpegia et toute l'organisation. Belle soirée pour un concert qui a commencé par cinq titres du dernier album F.E.A.R. et continué avec des morceaux piochés dans une discographie pléthorique, de Season's End à Marbles, en passant par Brave et This Strange Engine. Un concert qui a réussi le challenge d'une ambiance intimiste dans une grande salle. La dernière venue de Marillion en terre mirabellienne remonte à Octobre 1985, espérons qu'ils reviennent la prochaine fois encore plus vite dans l'Est.
Je prends encore quelques photos dans l'antre rouge de L'Autre Canal où une expo photo est affichée. Steve Rothery, affable, est comme à son habitude en train de distribuer les autographes et de se faire prendre en photo avec des fans. Un ou deux bonsoirs, et encore impressionné par la foule, je quitte les lieux et ses néons étincelants dans la nuit.
Set List:
Eldorado
Living In FEAR
The Leavers
White Paper
The New Kings
GO
Afraid of Sunlight
The Great Escape
Easter
Man of 1000 Faces
Waiting to Happen
Neverland
Merci à tous.
Laurent.
Rédigé par : Laurent