Concert Roger Waters 9 juin 2018
U Arena – Nanterre
Cela faisait dix ans que je n’étais pas venu à Paris pour un concert. J’ai donc fait le voyage pour voir Roger Waters dans la nouvelle salle multifonctions de Nanterre, la U Arena qui peut accueillir jusqu’à 40 000 personnes en mode concert. La date du 9 juin avait été ajoutée après celle initiale du 8 juin 2018. Si cette dernière était complète, c’était loin d’être le cas le second soir. En arrivant, je cherche l’entrée correspondant à mon billet. Là on me dit que le dernier étage où j’avais ma place est fermée et qu’ils allaient donc me surclasser en me donnant une nouvelle place où je serais plus prêt de la scène. J’ai un fort doute sur ce fait mais je suis plus face à celle-ci et à l’écran géant, c’est donc plutôt pas si mal au final.
La fosse est coupée en deux. La moitié proche de la scène est réservée aux tickets or avec des places assises sur des chaises. La moitié éloignée est destinée aux spectateurs debout. Le concert était annoncé à 20 heures pile.
Alors qu’est sorti l’an dernier son dernier album solo, Is this the life we really want ?, celui-ci n’est pas mis en avant pour cette tournée. Celle-ci s’intitule Us and them comme le titre présent sur The dark side of the moon, album joué en quasi intégralité ici. Mais je pense qu’il a aussi été choisi parce qu’il convient bien au message que veut faire passer Roger Waters.
C’est avec quelques minutes de retard qu’apparaît sur le très long écran géant (qui devait faire pas loin de 70 mètres) une image de dune avec une personne assise qui regarde la mer de dos. Il faut noter que le stade est prévu pour avoir un écran géant à cet endroit aussi en configuration sportive. Le son du vent et des mouettes se fait entendre aux quatre coins de la salle. Cela dure environ un quart d’heure avant que le ciel devienne rouge. Nous nous éloignons alors de la terre au son de ‘Speak to me’ avant d’enchainer sur ‘Breathe’. Les dix musiciens sont regroupés au centre de la scène, semblant tout petits par rapport à l’écran. Deux choristes blondes sont présentes. Il s’agit de Jess Wolfe et Holly Leassig du sympathique groupe Lucius si vous aimez la pop folk. La basse vrombissante de ‘One of these days’ se fait ensuite entendre et Roger Waters commence à se promener sur la longue scène. Il apparaît aussi sur l’écran géant par instant au milieu des videos. Des horloges apparaissent ensuite à l’écran pour lancer ‘Time’ suivie de ‘Breathe’ et ‘The great gig in the sky’ où Jess Wolfe et Holly Laessing livrent une grande performance vocale. Changement d’univers avec l’apparition d’une planète rouge et d’une machine en forme de bête alors que se font entendre les notes de ‘Welcome to the machine’. Viennent ensuite trois titres du dernier album solo de Waters. Le public ne les connaît pas forcément et donc la ferveur retombe un peu. Pourtant musicalement ces titres ne dépareillent pas. Ils sonnent de la même manière que des morceaux plus anciens.
Aux premiers accords de ‘Wish you were here’, le public reprend du poil de la bête. ‘The happiest days of our lives’ annonce l’arrivée de ’Another brick in the wall part 2’. Une dizaine de jeunes en habits de prisonniers cagoulés font leur apparition sur scène. Ceux-ci sont toujours issus de la région où le concert a lieu. Ils commencent à oter leur cagoule puis chantent et dansent avant d’ôter leur chemise et de laisser apparaître un tee-shirt noir sur lequel est inscrit Resist. ‘Another brick in the wall part 3’ est directement enchaîné. Roger Waters annonce un entracte et le mot RESIST s’affiche en grand sur l’écran. Puis Resist what et Resist who. Vont suivre une liste de noms de personnes auxquels il faut résister. Le premier d’entre eux est Mark Zuckerberg. Suivront notamment pêle-mêle l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU, les dirigeants d’extrême droite européeene dont notre Le Pen nationale, le prince d’Arabie saoudite, un secrétaire d’état américain et la discrimination antipalestinienne qui reviendra plusieurs fois lors de la soirée. Il faut dire que Roger Waters est un membre très actif de l’organisation BDS qui appelle au boycott d’Israël à cause de sa ségrégation envers les palestiniens. Cela finira sur des thèmes plus environnementaux avec les plastiques qui tuent les baleines. Les réactions du public à cet inventaire sont plutôt timides.
Après cet entracte très politique, la suite allait forcément l’être aussi. Et quoi de mieux qu’Animals pour l’évoquer. Après une sonnerie d’alarme, des craquements et un son de tremblement de terre font apparaître des tours qui se révéleront être celles de l’usine de Battersfield et qui prendront place au-dessus de l’écran, ce dernier représentant le corps de l’usine. Le cochon volant est aussi présent au-dessus de l’usine. ‘Dogs’ et ‘Pigs’ vont s’enchaîner durant une bonne vingtaine de minutes. Les porcs, maîtres du monde, sont passés au pilori. Sur ‘Dogs’, c’est le musicien californien Jonathan Wilson, auteur d’albums solo plutot sympathiques, qui chante, alors que les choristes s’escriment sur les percussions. La guitare de Dave Kilminster est mise en avant lors de ses soli. Sur Pigs de nombreuses caricatures de Donald Trump de plus ou moins bon goût défilent sur l’écran. Un cochon gonflable vient survoler les spectateurs. Sur le final, une série de citations de Trump apparaissent sur l’écran géant avec pour finir “Trump est un porc”.
‘Money’ permet encore de mettre à l’honneur une belle palette de nos dirigeants mondiaux. ‘Us and them’ permet à Ian Ritchie de se mettre en valeur au saxophone. Le message politique ou humanitaire est encore présent sur l’écran avec notamment les manifestations Black lives matters, des bombardements, des soldats, des enfants, des bidonvilles et des gens qui cherchent de la nourriture dans les poubelles.
Un autre titre du dernier solo de Waters est ensuite joué, le single ‘Smell the roses’. Le solo est ici exécuté par Jonathan Wilson. Retour à la face cachée de la lune avec ‘Brain Damage’ et ‘Eclipse’, alors qu’une lune noire parcourt la salle, une pyramide à base de lasers apparaît au dessus des spectateurs bientôt traversée par des rayons aux couleurs arc en ciel reconstituant la pochette de l’album.
Roger Waters profite de l’ovation pour présenter les musiciens. Outre ceux déjà cités, nous retrouvons Bo Koster (claviers et piano), Jon Carin (claviers, piano et guitares), et Joey Waronker (batterie). Puis il demande au public son attention pour lire un petit texte au cours duquel il a notamment remercié la France pour 1789 (Déclaration des droits de l’homme) et 1948 (Déclaration universelle des droits de l’homme) mais l’a aussi critiqué pour l’emprisonnement de certains militants de BDS. C’est d’ailleurs au niveau de cette association que son engagement est le plus polémique. Avant de juger, je pense qu’il est préférable de se renseigner.
En rappel, Roger Waters nous laissera ‘Comfortably numb’ chanté en grande partie par Gus Syffert (basse et guitare). Le solo final joué par Dave Kilminster est toujours terrible.
Le show se termine par le retour de l’image du début avec une fillette qui vient rejoindre sa mère qui était assise sur la dune.
Le son était excellent et d’un niveau sonore loin d’être assourdissant. Ce concert alliait parfaitement splendeur visuelle et musique enchanteresse superbement interprétée. A 75 ans, Roger Waters a toujours une présence assez étonnante. Ce concert méritait indubitablement le déplacement. Pour le coté politique, à chacun de se faire une opinion. Il n’empêche qu’après le mouvement “Dénonce ton porc”, 2018 n’est vraiment pas l’année du pauvre cochon.
Set-list :
Partie 1
Speak to me
Breathe
One of these days
Time
Breathe reprise
The great gig in the sky
Welcome to the machine
Déjà vu
The Last refugee
Picture that
Wish you where here
The happiest days of our lives
Another brick in the wall part 2
Another brick in the wall part 3
Partie 2
Dogs
Pigs (three different ones)
Money
Us and them
Smells the roses
Brain damage
Eclipse
Rappel : Comfortably numb
Rédigé par : Jean-Noël