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Interview de Ivan Jacquin de Foreign le 30/09/2015
Alors que la seconde partie de The Symphony of the Wandering Jew est en préparation, Ivan Jacquin compositeur et musicien du projet, vient nous parler de Foreign.



Jean-Christophe : Bonjour Ivan, pour te présenter, il faudrait parler de nombreux projets musicaux, Pulse dernièrement (un cover Pink Floyd), Psychanoïa, Project One, Foreign… Tu es un boulimique de musique ?

Ivan : Salut Jean-Christophe, tu sais j’ai commencé le solfège à 6 ans et depuis, la musique ne m’a pas quitté. J’ai fait du piano classique, jazz, de la batterie, de la guitare acoustique, des percussions ; j’ai joué du métal, de la pop, du jazz, du rock celtique, du rock progressif, je suis depuis presque 25 ans dans le monde musical des groupes régionaux de tous styles, et je ne peux pas me passer de musique, j’ai cela dans le sang. Même une journée sans en écouter m’est inconcevable… Alors oui, aujourd’hui, je m’éclate dans PULSE – Pink Floyd Tribute dans lequel je suis chanteur/claviériste, Psychanoïa (rock metal prog) avec lequel nous sommes en train d’enregistrer notre troisième album, Amonya (trio acoustic rock cabaret) et bien sûr FOREIGN.

Ivan

Jean-Christophe : Nous te rencontrons aujourd’hui pour parler de Foreign dont le second volume est en cours de réalisation. Peux-tu, en quelques mots, nous décrire Foreign ?

Ivan : En quelques mots ? Hum… (rires) c’est un projet musical axé autour du rock bien sûr et de la musique orchestrale, en faisant parler toutes mes influences musicales (rock, metal, prog, jazz, celtiques, médiévales, baroques, electro, world…), intégrant des instruments variés et parfois exotiques (violoncelle, hautbois, dulcimer à marteaux, harpe classique et celtique, doudouk, low whistle….) pour un voyage musical hors du temps et des frontières. L’histoire est inspirée du mythe du Juif Errant, homme maudit par Jésus pour lui avoir refusé un peu d’eau sur le chemin de la crucifixion, et pour cela condamné à errer sur la terre jusqu’à la fin des temps, ou jusqu’à sa rédemption.

Jean-Christophe : L’an passé, nous découvrions le premier disque, The Symphony of the Wandering Jew Part. 1. Dix huit musiciens, onze chanteurs, un choeur de quatorze voix, comment réussit-on a mettre en place un projet d’une telle envergure ?

Ivan : Il faut en tout premier lieu être un peu fou (rires), trouver des gens aussi fous, et surtout ne plus se donner de limites. J’ai fait ce que j’avais envie de faire, j’ai ce projet dans la tête depuis le lycée et la technique et l’informatique musicale aidant, je me suis enfin lancé il y a quatre ans et entouré de certaines personnes expérimentées dans le mixage et la production musicale (je pense bien sûr à mon ami Olivier Gaudet de Psychanoïa). Puis j’ai demandé aux musiciens avec qui j’avais joué depuis toutes ces années s’ils voulaient collaborer (ils se sont tous empressés de dire oui !), ai fait de belles rencontres grâce à Internet et le projet s’est ficelé assez facilement, avec un enthousiasme et un partage humain hallucinant pour un projet amateur… Et même si le temps et l’argent nous ont manqué pour aller plus loin dans le mixage et la production, je suis très fier de ce premier album qui retranscrit très bien ce que j’avais en tête au départ, la diversité des émotions, des ambiances et ce rendu assez naturel de la production est vraiment le reflet de ce que je désirais…

Jean-Christophe : Comment compose-t-on un album de ce genre et ensuite de quelle manière l’enregistre-t-on ? Ça ne doit pas être aisé de gérer les plannings pour tout ce petit monde.

Ivan : C’était le plus difficile, faire coïncider le planning de chaque intervenant et le mien, qui est aussi très chargé… Nous avons enregistré pendant 6 mois au Wandering Studio, chez moi donc, chaque weekend un chanteur, une violoniste, le chœur mixte ou un guitariste venait enregistrer ses parties et certains comme les batteurs et les bassistes, et une chanteuse ont enregistré chez eux, car ils ne pouvaient se déplacer ou avaient le matériel adéquat à disposition… Certaines voix et instruments (narration, orgues, piano, le choeur…) ont aussi été faits au Studio La Boucherie qui a réalisé le mixage final par Olivier Gaudet et Jérôme Perrier, propriétaire du lieu... Pour la composition, elle s’est étalée sur quinze ans environ, The Running, The Quest datent de quelques années maintenant et certaines chansons du deuxième album viennent aussi de cette époque où je composais sans savoir à quoi allaient me servir ces morceaux… Mais la plupart de la composition a été réalisée entre 2010 et 2014, jusqu’à la dernière prise du dernier morceau enregistré (en l’occurrence The worst pain ever felt...), pardon, mes musiciens, je vous ai fait souffrir, je le sais… (rires)

Jean-Christophe : Alors que sur le premier album, tu t’entourais d’artistes anonymes, il semblerait que pour le second, des noms connus se pointent à l’horizon : Mike Lepond de Symphony X, Zak Stevens de Savatage ou encore Leo Margarit de Pain of Salvation. Vous passez à la vitesse supérieure ?

Ivan : Oui, après avoir réalisé un bout de mon rêve avec ce premier album, la suite coulait de source, il fallait que j’ose enfin demander à certaines de mes idoles de participer à la suite, mais je n’avais pas grand espoir, car malgré mon gros et long bagage artistique, je ne suis pas plus connu que cela dans le milieu… J’ai donc été ravi et surpris de voir autant d’envie et d’enthousiasme de la part de ces pointures à participer à cette aventure incroyable.

Ivan

Jean-Christophe : Qu’est-ce que cela implique d’inviter ce genres de pointures dans un projet comme Foreign ? Et comment les as-tu convaincus de participer à l’aventure ?

Ivan : Cela implique beaucoup plus d’argent !!! (rires) et une pression en plus pour composer des morceaux qui doivent être à la hauteur de leur implication et de leur talent. Avoir Zak Stevens est un rêve éveillé pour moi car j’ai grandi avec Savatage, groupe sous-estimé en France d’ailleurs, le premier du genre à avoir intégré des éléments symphoniques dans un hard-rock assez basique, du moins au début. Je connais leurs albums par cœur et je suis très honoré, surtout de la façon dont cela s’est passé… un simple mail, et sa réponse m’est parvenue le lendemain, et pendant tout le processus d’enregistrement (il l’a fait chez lui, aux USA..), nous nous envoyions 2 mails par semaine, comme des vieux potes, incroyable… Même chose pour Leo Margarit qui est un mec extra et super humble… Vous verrez les parties qu’il a posées sur 4 morceaux, vous allez tomber à la renverse, impressionnant de technique et en même temps de légèreté, à l’image de ce qu’il joue dans Pain of Salvation… Mike Lepond de Symphony X nous fait aussi l’honneur de jouer sur 2 morceaux, et Amanda Lehmann qui fait partie de la bande du grand Steve Hackett (ex-Genesis) chantera deux morceaux et jouera quelques chorus de guitares… Il y aura aussi Gilberto Melendez de Maxxwell (en tournée actuellement avec Rage et que j’avais rencontré lorsqu’ils ont ouvert pour MSG l’année dernière), certains des chanteurs du premier album (pour les personnages récurrents) et des musiciens déjà présents sur la « Part I », et deux autres grands chanteurs de metal-prog européens qui seront dévoilés un peu plus tard, je n’en reviens toujours pas qu’ils aient accepté… Vous aurez la surprise dans quelques temps…

Jean-Christophe : Le thème de The Symphony of the Wandering Jew, car il s’agit d’un rock opéra, est le Juif Errant , d’où vient cette envie d’écrire cette histoire ?

Ivan : Ce mythe se prête à un concept grandiloquent car il se passe sur la longueur, 2000 ans d’histoire à résumer, ou plutôt prendre quelques événements de l’histoire pour agrémenter le personnage, il y a de quoi faire… et je trouve cette histoire presque romantique, même si au départ elle est cruelle, de plus de la part de Jésus lui-même (d’ailleurs incarné dans Foreign par un chanteur Thrash, Thierry Marquez de Broken Edge), donc propice à l’épique !! C’est en fait le livre de Jean d’Ormesson qui m’a le plus influencé. D’autres écrivains ou dramaturges ont écrit sur Ahasvérus le juif maudit mais d’Ormesson a écrit une fresque allant de la Rome antique jusqu’à nos jours avec une passion et une richesse de détails qui forcent le respect. Alors j’ai fait ma propre relecture du mythe, en piochant dans tous ces écrits et en inventant quelques thèmes et même quelques personnages…

Ivan

Jean-Christophe : Dans la chronique de The Symphony of the Wandering Jew part. 1, je compare souvent l’album a des projets comme Ayreon, ou à la musique de Arjen Lucassen en général, que penses-tu de la comparaison, est-il un de tes modèles artistiques ?

Ivan : Oh que oui, et j’enrage quand je vois qu’il a fait des apparitions dans les derniers Anthropia et Melted Space, alors que j’étais en contact avec lui bien avant eux et qu’il n’a pas pu prendre part au premier album faute d’emploi du temps (il était en train d’enregistrer les voix de The Theory of Everything…) Un jour peut-être… Mais oui, il est clair que Arjen et ses 2 principaux projets Ayreon et Star One sont une influence majeure dans mon processus artistique, surtout qu’ils contiennent presque tous mes chanteurs préférés…

Jean-Christophe : Dans le même ordre d’idée, quels sont les musiciens/groupes qui ont façonné ta culture rock ?

Ivan : Il y en a tant… J’ai grandi avec Iron Maiden, Judas Priest, Dio, W.A.S.P., Môtley Crüe, Accept, les premiers Metallica/ Slayer/ Anthrax/Suicidal Tendencies... où tout était nouveau, où tous les styles de metal étaient en train de surgir de nulle part…. Je suis un enfant de la NWOBHM on peut dire… Les groupes qui m’ont le plus marqué après toutes ces années sont Pink Floyd, Led Zeppelin, Deep Purple, Toto, Steve Vai, Kansas, Magma, Dream Theater, Marillion, les premiers Helloween, Nightwish et Stratovarius… Pour les vocalistes seuls, Sting est un artiste hallucinant que j’adore, de même que Peter Gabriel, et vu que je suis chanteur, j’avoue avoir été influencé et séduit par les phrasés et attitudes de Steve Hogarth, Steve Walsh, Tarja Turunen et Sharon Den Adel… mais il y en a tellement…

Jean-Christophe : Combien y aura-t-il d’opus à The Symphony of the Wandering Jew et quand sortira le second disque ?

Ivan : Foreign est une trilogie, le premier album couvrait la période de 33 après JC à 1100 environ. Le deuxième opus commencera à Jérusalem, en pleine guerre sainte (Zak Stevens incarne d’ailleurs le terrible Saladin !) et se terminera à l’aube de la révolution industrielle, vers 1850… Beaucoup de choses sont déjà enregistrées et la composition des 13 nouveaux morceaux est pratiquement terminée… Nous découvrirons quelques moments cachés de François Ier, Mona Lisa, Nostradamus, Mozart… Le disque sortira fin 2016… Quant au troisième album qui verra le jour si tout va bien en 2018-2019, il couvrira de 1850 jusqu’à un proche futur…

Ivan

Jean-Christophe : Quel bilan humain, musical et financier retires-tu du premier album ? Le projet rentre-t-il dans ses fonds et la musique s’exporte-t-elle à l’étranger ?

Ivan : Le bilan humain est purement positif, j’ai renoué avec d’anciennes connaissances que j’avais perdues de vue, j’ai rencontré des gens gentils, passionnés et talentueux, qui m’ont transporté dans leur univers autant que je les ai amené dans le mien, tout cela au service de ma musique ce qui est quand même considérable, les échanges et partages ont été merveilleux… Quant à l’aspect financier, il n’y a pas eu de déficit à proprement parler et chaque centime alloué a été réinvesti pour le suivant. Par contre, pour ce deuxième album, nous sommes en pleine recherche de subventions et de dons, car le budget a considérablement augmenté… Il ne faut pas se leurrer, tant que nous ne serons pas supportés par un label, une maison de disque ou un producteur, le projet restera underground et ne passera jamais la grande porte, bien qu’il le mérite… Des exemplaires ont été vendus au Japon, aux Etats-Unis, au Portugal, en Suisse, au Brésil, en Allemagne, en Pologne, en Angleterre… mais sporadiquement. Par contre, je suis certain que si j’avais sorti le projet en Allemagne ou en Angleterre, il aurait fait un malheur dès sa sortie. La France n’est pas le bon pays pour sortir des choses aussi variées, aussi hybrides et pas assez stéréotypées… C’est donc avec une grande joie que je réponds à cette interview aujourd’hui et que j’en profite pour remercier tous les webzines comme Neoprog pour permettre de parler de cet opera-rock, grâce à vous tous, nous sommes un peu moins dans l’ombre chaque jour…

Jean-Christophe : Enfin, est-il déraisonnable d’espérer écouter un jour Foreign en live ? Cela restera-t-il juste un rock opéra studio ?

Ivan : Ah ah ! La grande question qu’on me pose depuis que le CD est sorti… à laquelle je réponds : pourquoi pas ? Si un metteur en scène ou un tourneur tombe amoureux du projet et s’occupe de tout l’aspect scénique, on pourra mettre en place quelque chose… mais pour un concert ? deux ? dix ? Vu le nombre d’intervenants (40 pour le premier, 50 pour le deuxième à venir…), ce n’est vraiment pas aisé… La porte est ouverte…

Jean-Christophe : Merci pour ces réponses, Ivan, nous attendons avec impatience cette seconde partie de The Symphony of the Wandering Jew.

Ivan : Merci une fois de plus à ton intérêt envers Foreign, le 1er disque est bien sûr toujours dispo sur quadrifonic.fr, upmystore ou bandcamp… Un grand salut à tous les lecteurs de Neoprog, plongez-vous vite dans l’univers de Ahasvérus et sa symphonie et suivez sa quête de l’absolu…

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Ivan

Rédigé par Jean-Christophe le 30/09/2015