Titres
Formation en 1999
Anders Hovdan [guitariste,bassiste] jusque 2018, Asle Tostrup [chanteur,guitariste,bassiste,clavier], Bjørn Riis [chanteur,guitariste], Joachim Slikker [batteur] jusque 2009, Jørgen Hagen [clavier] jusque 2018, Henrik Fossum [batteur] depuis 2010
Trois ans après leur dernier album, les norvégiens d'Airbag reviennent avec un nouvel opus, Disconnected, habillé d'une pochette tout de noir vêtue, et qui sort aujourd’hui. Ceux qui suivent les actualités du groupe sont déjà au courant du départ du claviériste, Jørgen Hagen, pour raisons personnelles. Votre fidèle serviteur n'a pu avoir de confirmation, mais il est fortement probable que Jørgen ait encore participé à ce dernier album en tant que membre à part entière.
Noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir comme dirait notre Johnny national. Noir comme la pochette - très (trop ?) sobre -, et ce sigle très peu contrasté que l'on a un peu de peine à distinguer, qui permet d'allumer ou de déconnecter à volonté tous les bijoux technologiques qui sont à portée de main. Noir comme les paroles, ce qui est finalement habituel pour Airbag dont l'univers est souvent empreint de mélancolie (doux euphémisme). Je suis personnellement resté scotché sur All Rights Removed (leur avant-dernier album) qui permet de littéralement planer sans aucun psychotrope, et j'ai retrouvé au travers des paroles ce monde déjà évoqué dans leur opus de 2011. Avec Disconnected nous plongeons là encore dans un univers pétri de désillusions, de personnages perclus de solitude, abandonnés par l'amour, isolés, en pleine dépression, au bord du gouffre. Lisez juste les six titres de l'album, il faut bien constater que tout ça ne respire pas trop la joie de vivre. Du 'self-made man' prédateur prêt à tout pour rester au sommet ('Killer') au gars qui a envie de passer l'arme à gauche en appuyant symboliquement sur ce fameux bouton ('Disconnected'), en passant par le pauvre hère largué par sa compagne et qui s'aperçoit qu'il est trop tard pour changer ('Broken'), par celui incapable de vivre sans sa moitié partie ('Slave'), ou par le somnambule qui aide sa compagne à lâcher prise et monter au ciel ('Sleepwalker'), il faut bien dire que les zygomatiques peuvent aller se coucher. Peut-être bien que l'on parle toujours du même personnage dans tous les titres, à vous de voir. Eh bien voilà nous avons encore perdu la moitié des quatre internautes qui nous lisent ….. pour les autres, allez jusqu'au bout, je vais parler bien sûr de la musique, et du plaisir que procure cet album malgré des sujets assez mortifères.
Les paroles ne vont pas sans la musique, et inversement, et quand les deux sont raccord en général ça le fait. C'est peu ou prou ce qui se passe encore une fois dans cet album. L'accent est essentiellement mis sur le combo guitares-batterie, avec bien sûr une prédominance des guitares. Le premier titre, d'un peu plus de neuf minutes, emmené par une batterie régulière et tranquille, vous embarque tout doucement. Coupé grosso modo en deux par un mini trou noir de perdition où quelques notes-lumières s'allument, alors que la batterie se met à scintiller, ce titre muscle son rythme et ses accords pour finir avec des guitares plus tendues, plus aiguisées, zébrant l'air de leurs plaintes et de ce cri que l'on pourrait attribuer à un loup. Impossible sur ce titre de ne pas y entendre des accents de guitare à la U2, notamment en début et en milieu de morceau.
'Broken' est quant à lui une sorte de ballade assez lente et mélancolique. On y reconnait la voix mi parlée mi chantée de Asle, où s'y mêlent les accords clairs de guitare acoustique, des percus en mode fûts à sonorité sourde et étouffée, et bien sûr un long solo de guitare.
'Slave' vous plongera quant à lui dans un lieu mystérieux et indéfinissable. On pourrait être dans le vide intersidéral, dans un caisson d'isolement, en tout cas il n'y a vraiment pas grand monde à proximité. Ce titre est là encore assez lent, peu varié. La voix qui s'exprime est un long déchirement. C'est une voix implorante, au bord du gouffre, la voix d'un personnage qui ne sait plus où aller. Ce titre est en fait une marche implacable, engluée et lourde, à la manière d'un destin pesant qui avance vers une destination inconnue. Une petite envolée de guitare à la fin du titre semble percer timidement de cette obscurité pour envoyer quelques phot(s)ons de lumière.
'Sleepwalker' retourne dans la ballade plus positive avec de nouveau de beaux accords de guitare acoustique. C'est beau, vénéneux, délicieusement attirant, à la manière de la sirène qui vous attire dans ses fonds marins. Un motif hypnotique aux claviers, un solo de guitare acide, et le titre s'arrête calmement avec une basse apaisante.
'Disconnected', du haut de ses treize minutes et de ses nombreuses sections, retourne dans des limbes indéfinissables. Un orgue lâche quelques bulles sonores dans un brouillard, là encore perdu au milieu de nulle part. La batterie intervient et nous finissons par entrer complètement dans cet éther vaporeux avec la voix de Asle. Le titre se met réellement en branle à la quatrième minute, avant d'avoir une batterie qui crépite et scintille une nouvelle fois, un piano qui accompagne de deux trois notes, et une basse bien appuyée et mélodique. Superbe trouvaille, c'est bon par où ça passe. La guitare bien aiguisée déroule son solo tranchant, avant de revenir au départ, néanmoins avec la sensation d'avoir un peu plus de repères. Bon ça n'empêche que notre personnage a encore et toujours la tête complètement à l'envers. La musique s'épaissit ensuite pour arriver au silence, et entendre une foule, un repère supplémentaire. La fin du titre a de très très forts parfums de guitare, épique et plus sucrée, à la Pink Floyd. Euh en fait ça sent même carrément à fond le Pink Floyd, pas vraiment un scoop pour un groupe comme Airbag en fait.
Plus d'espoir, vraiment ? Eh bien si, le dernier titre, 'Returned', est un retour à la lumière de notre personnage. Ses trois notes répétées à la guitare me font penser au 'Feel so low' de Porcupine Tree. Vous voyez que l’on reste quand même dans le registre du spleen… De belles couleurs positives se dégagent de ce titre apaisé. Les guitares allument petit à petit des étoiles dans cette obscurité, sorte de guide qui vont permettre à notre personnage de retrouver son chemin vers sa dulcinée. Bon pour être honnête je ne sais pas si notre homme est passé de l'autre côté de la barrière ou non, à vous de voir.
Je me suis beaucoup attardé sur les paroles qui dénotent une ambiance assez lourde. La musique épaule bien ces paroles, elle est belle et envoutante. Si vous écoutez cet album, rassurez-vous, vous ne tomberez pas en dépression. Vous ne sauterez pas au plafond de joie, mais laissez-vous juste doucement vous pénétrer par ce spleen et cette sorte de destin implacable qui vous place dans un autre état, dans une autre dimension, une dimension aux parfums capiteux d'abandon total. Comme souvent avec Airbag, il faut aimer, se laisser embarquer dans ces eaux délicieusement mélancoliques et dans cet univers vraiment à part, déconnecté de tout lien terrien. Pour moi ce nouvel album n'égale pas All Rights Removed, que je mets au sommet de la disco d'Airbag (c'est avec cet album que j'ai découvert le groupe norvégien, il me reste donc toujours en mémoire la fraîcheur de la découverte, c'est une explication qui en vaut bien une autre).
Disconnected est un album dans la pure lignée du groupe d'Oslo. Plongez dans les délices musicaux de cet abîme noir, vous en ressortirez paradoxalement apaisé et zen.
Internet: http://www.airbagdisconnected.com
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Vidéo :