Titres
Formation en 2010
L’illustration qui orne la pochette de Cant Del Corlo, la parenthèse acoustique proposée par les italiens de Kanseil, est une invitation. Une invitation à se recentrer sur l’essentiel, à se questionner sur le temps qui passe, sur le cycle sans fin des saisons, à s’émerveiller de l’équilibre de la nature et de la stabilité de ses hôtes qui, malgré les affres du temps, résistent et rassurent… Le groupe semble donc nous convier à une promenade méditative. Sans hésiter, nous enjambons le cadre doré de ce visuel pour aller à la rencontre de cette jeune femme qui a trouvé refuge au pied de ce chêne majestueux et qui, en quelque sorte, revient à ses racines. Mélancoliquement, elle actionne son rouet, symbole ici de l’éternel recommencement des choses et renforce, par là même, le concept développé sur cet EP. Œuvre contemplative à la saveur folk et païenne, Cant Del Corlo que l’on peut traduire approximativement par « Le chant de la roue qui tourne », est un mini album inspiré des quatre saisons, offrant à l’auditeur la possibilité de s’immerger, quelques instants, dans une réflexion sur l’inexorable écoulement du temps...
Signé par le label allemand Rockshots Records qui héberge dans son écurie des formations metal aux penchants variés, Kanseil surprend, en adoucissant si tôt dans sa jeune carrière son répertoire dont les fondements reposent sur le folk death metal. Exit donc l’électrique et le chant growlé. Ne subsistent, sur cette friandise, que légèreté et douceur. En s’accordant cette césure, en cassant astucieusement la dynamique lancée sur ces deux premiers albums, les italiens dévoilent leur versatilité, leur maîtrise de l’art de la composition acoustique et élargissent ainsi leur public. En bref, ils nous livrent un produit plus accessible, susceptible de plaire à tout le monde. Pour autant, les fans de la première heure ne devraient pas être trop perturbés par cette orientation. En effet, la troupe originaire de Fregona (au nord de Venise) a déjà incorporé dans ses précédentes compositions des passages débranchés. Au contraire, ce mini album devrait leur donner davantage de légitimité puisqu’ils ne peuvent pas ici se cacher derrière une épaisse couche de guitare pour développer leur folk traditionnel. Ainsi, bouzouki, kantele, rauschpfeife (instrument de la famille des bois) et autre flûte sont de sortie et viennent colorer la musique du septuor d’atmosphères celtiques et médiévales.
Composé de six titres, dont une intro et une outro narrée, ce conte chanté en italien débute avec ‘Verta’. Cet arrangement dynamique, le plus traditionnel de l'album au sens propre du terme, repose en partie sur une mélodie fraîche et entêtante emmenée par le rauschpfeife. Le chant rythmé et maitrisé d’Andrea Facchin, associé aux percussions variées, accentue encore davantage le côté festif de ce titre. En fermant les yeux, on s’imagine sur la place d’une cité médiévale un jour de festivité. S’ensuit ‘Tra Le Fronde’ (Entre les branches), une ballade rock celtique à la mélodie plutôt conventionnelle. Si, dans l’ensemble, ce morceau est bien arrangé, le refrain, chanté sur plusieurs hauteurs, finit par lasser après plusieurs écoutes, tout comme les chœurs (des oh oh maideniens) pas des plus originaux. Toutefois, saluons les délicates interventions du flûtiste, le solo de guitare parfaitement construit ainsi que le final tout en arpège assurant intelligemment la transition avec le titre suivant.
Avec ‘Boscars’ et ‘Il Sergente Nella Neve’, l’atmosphère s’assombrit un peu. Ces titres poétiques ne sont clairement pas à écouter si votre moral n’est pas au beau fixe … Deux jolies chansons à rapprocher davantage de l’univers celtique que médiéval. Certains leur reprocheront peut-être leur caractère mielleux, avec la musique celtique on n’est jamais très loin du cliché, mais elles ont le mérite de nous plonger dans un état proche de l’introspection. La flûte et le rauschpfeife nous caressent. Le chanteur semble nous conter des histoires appartenant à des époques reculées. Ensemble, ils mènent les mélodies et définissent le chemin à suivre, même si les guitares ne sont pas en reste pour autant. C’est beau, c’est triste, c’est lent … Une lenteur apaisante. L’outro, reprenant le thème de départ, viendra apporter un peu de lumière et d’espoir en levant ce voile gris qui s’est progressivement abattu sur l’album.
‘Cant Del Corlo’ prend déjà fin après un peu plus de vingt minutes de musique. Kanseil nous a donc offert un interlude bien agréable, une petite bouffée d’air. Les puristes s’empresseront certainement de dénoncer le côté un peu cheap de ses ambiances celtiques mais, l’exécution est propre. Des chansons à écouter idéalement en live.