Titres
Au titre des albums qui ont marqué 2015, on se souviendra de la sortie en tout début d'année de l'excellent opus de Beardfish, +4626-COMFORTZONE, où Rikard Sjöblom, voix principale du groupe, a imprimé cet album de sa patte multi instrumentiste aux guitares et claviers. Depuis le suédois ne s'est pas reposé, loin de là. Il récidive, cette fois-ci en mode solo, avec cet Unbendable Sleep et une pochette encore une fois originale. Il s'agit en fait du second album solo de Rikard, qui a déjà sorti sous son nom en 2006 'Cyklonmannen’, un premier album instrumental, du nom d'un roman de Sture Dahlström. La pochette de ce second album est en fait un tableau de Bernt Daniel, intitulé Beste Schweizermilch (quel grand mystère que ce titre), et qui a tapé dans l'œil de Rikard. Cet artiste peintre a notamment illustré la majorité des romans de Sture Dahlström - ceci expliquant cela -, et a créé une série de peintures du même tonneau, évoquant des endroits de villes d'Europe en 1914, en une sorte de peinture collage, bousculant les codes de la perspective et de la fuite d'horizon.
Mais je m'égare, revenons à la musique.
Ayant une fenêtre de tir favorable entre ses nombreuses activités et projets (Rikard est aussi membre de Big Big Train depuis mi 2014), notre suédois estime que c'était le bon moment pour lui pour sortir un nouvel album 100 % solo, signé cette fois de nouveau de son vrai nom. Son premier projet solo, de nom d'artiste Gungfly, s'est étoffé avec le temps d'autres membres et s'est en fait éloigné de son objectif premier en devenant un groupe à part entière.
Photo: Simon Hogg
Dès le premier titre ('Love and War Part I'), cet album n'augure que du bon: une belle énergie dans l'introduction, une guitare acoustique qui n'envoie que des ondes positives, et bien sûr la voix familière du chanteur de Beardfish que l'on retrouve avec bonheur. On n'aura de cesse de suivre bien volontiers cette voix, en toute confiance sur une musique entraînante et rayonnante, à l'image du second titre ('Realm of You and Me') et de ce motif en trois notes de guitares qui fait toute la différence et donne beaucoup d'allant. Tout semble simple, se déroule facilement. C'est bien léché, avec une sensation de musique à la fois déjà entendue et encore renouvelée. La variété musicale est pourtant bien là: des légers accents folk sur un rythme de tambour de marche militaire de 'Will We Cry?' au rock léger, frais et tranquille de 'Anna Lee', en passant par un petit clin d'œil à Piazzolla un dimanche au bord de l'eau, à l'ombre des arbres ('Building a tent for Astor'), ainsi qu'aux breaks de rythmes de 'Under Northern Skies' et de son passage de guitare que Santana - voire Pink Floyd - n'auraient pas renié, la richesse musicale est bien présente.
Je mettrai une mention particulière pour 'Rhyme and Reason', titre au rock le plus appuyé de l'album, avec une batterie et une guitare plus lourdes, ainsi qu'une basse plus présente. Du haut de ses onze minutes, ce titre est un petit bijou. On ne compte plus les nombreuses articulations, sections rapides et lentes, arrêts expectatifs et relances continuelles. Tout contribue à la complexité du titre: le refrain annoncé au bout de deux minutes est subtilement annoncé et rappelé sur trois notes en fin de titre, quelques notes burlesques fusent en forme de trait d'humour après une section volontairement et délicieusement dissonante, les guitares acoustique et électrique s'expriment en solo et en duo, un orgue Hammond se met temporairement sur le devant de la scène, écrase une batterie martelée, et finit son envol sur un déluge de cymbales. Un régal.
Bien sûr votre serviteur aurait encore une fois aimé décortiquer les paroles pour vous donner une vue complète de cet album, mais au petit jeu de la course contre la montre, pandémie bien occidentale, la montre gagne assez souvent. Je vous laisse donc découvrir le territoire inexploré de ce bel album, qui semble parler de la vie, de la mort et de la confiance en soi et aux autres, et qui vous fera passer un très bon moment.
Pour moi le secret de cet album tient au rock en apparence simple, bien léché, frais, aéré, entraînant, et dont les guitares légères, acoustique et électrique, donnent une respiration tranquille qui ne s'essouffle jamais. Ajoutez-y une voix joyeuse et positive qui peut aussi bien monter dans les aigus que prendre des accents rauques et rocailleux, des claviers capables de saupoudrer quelques petits motifs électroniques à bon escient, et vous avez là un excellent cocktail à consommer sans modération.
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