Titres
Formation en 2002
Andy Tillison [clavier], Luke Machin [chanteur,guitariste], Jonas Reingold [bassiste], Theo Travis [flute,saxophone], Morgan Agren [batteur]
Découvrir un nouvel album de The Tangent ne peut être qu’une excellente nouvelle tant cette institution musicale et son gardien du temple, Andy Tillison, représentent une vraie garantie de qualité, une juxtaposition de styles et des joutes musicales savamment distillées. Ne tournons pas en rond, ce dixième album est encore une fois un défi à la géométrie musicale, aux certitudes des poncifs de notre genre progressif et à nos habitudes de confort musical bien douillet.
Attention aux non initiés, comme toute l’œuvre de The Tangent, cet opus nécessite une ouverture d’esprit à toute épreuve et une curiosité sans a priori.
La couverture très sobre met en scène un pion sur son tapis de feutre au premier plan sur fond blanc ; ne sommes-nous que des pions livrés à nous-mêmes mais ne pouvons nous pas un jour être promu, comme le pion au jeu d'échec, en quelque chose de plus grand ? Mon imagination fertile me dit que ce symbole a à voir avec les convictions et les prises de positions politiques ou sociétales d’Andy Tillison ; sur cet album les termes abordés vont des protestations sur les guerres, des Illuminati qui contrôlent secrètement les économies mondiales, au style de vie et la « culture » d’Ibiza et au phénomène Woodstock dont les acteurs sont devenus des adeptes du Superbowl et … des marchés boursiers.
Enregistré lors de la tournée conjointe avec Karmakanic, les deux groupes se sont produits sous le nom de Tangekanic, et Proxy se nourrit de cette dualité. Des preuves ? Et bien voilà un des titres les plus forts du précédent album de The Tangent, ‘Docteur Livingstone (I Presume)’ présent dans le live de Tangekanic :
D’entrée, le titre éponyme ‘Proxy’ est du The Tangent pur jus sans concession avec des envolées à la ELP, des épisodes à la Camel, Caravan ou King Crimson ; ce titre, ce sont seize minutes d’un millefeuille musical dont chaque couche a une saveur particulière ; ça gronde côté rythmique, ça « hammonde », la flûte montre le bout de son bec , la basse y va de son solo avant que la partie centrale chantée ne vienne délivrer le message politique dans une sarabande ponctuée par des claviers à la ELP et un final plus apaisé et … apaisant. L’autre titre de seize minutes également, ‘The Adulthood Lie’, se fait plus classique, progressivement parlant, mais nous délivre aussi son lot de surprises instrumentales et vocales avec une rythmique surprenante du début à la fin, qui peut dérouter ou qu’il faut apprivoiser, et quelques sons électro.
‘The Melting Andalusian Skies’ est l’instrumental de l’opus, aux consonances ibériques certes, mais à la base jazz rock sans chorizo même s’il y a des castagnettes pour amuser la galerie ; magnifiquement structuré, ce titre sublime la virtuosité des musiciens (entre autres, les interventions de Luke Machin à la guitare sont grandioses).
Le groove jazzy funky de ‘A Case of Misplaced Optimism’ dévoile une autre facette des richesses du groupe avec l’apport indéniable du chant de Goran Edman, à découvrir immédiatement :
Le magnifique ‘Supper’s’, le titre le plus accessible aux non initiés, un de mes préférés, clôture brillamment l'album, et ne renie rien de la patte de The Tangent. Vous y rencontrerez du Genesis sous perfusion bouillante (‘Supper’s Off’ ou ‘Supper’s Ready’ ?), du néoprog entraînant, du groove jazzy et un final époustouflant.
A noter que le digipack comprend un titre bonus ‘Excerpt From Exo-Oceans' de dix minutes que je n’ai pas eu le bonheur d’écouter sur l’album promotionnel.
Pour conclure, encore un très grand cru que ce Proxy avec une touche de modernité supplémentaire et, loin de faire du surplace, The Tangent enchaîne les albums avec bonheur et constance, le tout servi par des musiciens de haut vol pour notre plus grand plaisir.
Longue vie à The Tangent !