Jour 1
J'arrive au bar Das Rind sous une fine pluie froide et pénétrante, les petits chapiteaux dressés devant l'entrée de la salle sont les bienvenus pour s'abriter un peu. Das Rind se trouve à Rüsselheim am Main, à une trentaine de kilomètre au Sud-Ouest de Francfort. Autant dire que depuis Strasbourg le trajet d'environ 2h30 en voiture est encore supportable. Il est seulement 18:50 que déjà un petit groupe de français habitués sont là. Les bacs de CD sont encore en train d'être disposés sur les tables alignées dans l'allée menant à l'entrée. J'en profite pour faire connaissance avec quelques pseudos Facebook que je vois enfin dans la vraie vie. Au registre des contacts, je demande au hasard si Lilly Müller de PPR est là. Le sympathique et jovial barbu au crâne étincelant, Tom de son prénom, m'introduit dans la salle où Sounds Like The End of The World répète encore pour le soundcheck. La salle de concert avec buvette, indépendante du bar à deux étages du même nom, possède une capacité d'environ 300 personnes. Une petite scène et de gros lampions rouges descendant du plafond donnent une ambiance assez feutrée et intimiste. Mon accueillant interlocuteur me présente alors la mascotte attablée sur le matériel de la régie. Gros éclat de rire.
Sounds Like The End Of The World
Sounds like the End Of The World arrive sur scène vers 20:00. Le matériel étant déjà installé en majorité pour GIAA, c'est un peu la crise de l'immobilier pour les trois guitaristes alignés linéairement sur le devant de la scène. Seul Tomasz le batteur est en retrait, mais ça c'est un grand standard sur scène.
Sounds Like The End Of The World est un jeune groupe de post rock originaire de Gdansk (eh oui encore des polonais) qui a vu le jour en 2012. Encore un groupe dont je n'ai jamais entendu parler, et que je découvre. Après quelques recherches sur Internet, 5 membres du groupe - 4 sur scène = Michał Koziorowski, le claviériste absent pour cette soirée. Tomasz parlera très brièvement au nom du groupe à deux reprises, Michal le bassiste reste très statique et placide, alors que Wojciech est un tantinet plus énervé sur ses cordes et a la bougeotte métallique. Légère fatigue du voyage, prise de marques, shooting photo, et surtout bouchons oubliés dans la valise et tympans explosés dès le début, je bats ma coulpe : impossible de me rappeler, de me faire une idée précise de la musique distillée par les polonais, et surtout de dire si le quatuor joue comme si c'était la fin du monde. Que nos barbus chevelus de Poméranie veuillent bien me pardonner ce moment d'absence.
Setlist
Trafalgar Square
Watching Alex
Foalsowy
Lunar Tide
Pure Hybrid
Stages Of Delusion
Outflow
No Trespassing
Entre les deux groupes de la soirée, Tom monte sur la scène. C'est l'anniversaire d'un membre du staff de PPR. Il lui remet une peau de batterie blanche passée de mains en mains et signée par la foule présente dans la salle.
God Is An Astronaut
De la Pologne, nous passons ensuite directement à l'Irlande avec God Is An Astronaut (GIAA pour ceux qui ne veulent se faire comprendre que des initiés). Donc Dieu serait un astronaute. Je ne suis pas spécialiste, mais il me semble que cela se discute. D'ailleurs a-t-on retrouvé au moins sa combinaison spatiale ? Et puis il faudrait aussi qu'au huitième jour il ait aussi créé la fusée. Tout cela me paraît assez fumeux. Plus sérieusement, les noms de groupes prêtent souvent à sourire, et on se demande comment de tels noms peuvent surgir de l'imagination fertile des artistes. Pour la petite histoire, Pink Floyd, pour l'album Atom Heart Mother, était à court d'idées pour trouver un titre. Ils ont décidé de prendre au hasard une page dans un journal, et sont tombés sur un article qui parlait d'une femme enceinte ayant un pacemaker nucléaire. Comme quoi ça se joue des fois à peu de chose. Mais revenons à nos moutons.
C'est le grand jeu pour la bande des Kinsella twins : fumigènes, leds étoilées sur fond noir, débauche de rayons acérés de lumière tournoyante qui découpe le brouillard scénique. Il faut bien reconnaître que ça le fait. Je trouve la disposition de la scène assez bizarre : un duo de guitare ainsi que les claviers sont regroupés vers Lloyd et son jeu de batterie, alors que Tortsen bénéficie d'une large place sur la droite de la scène. Le matériel du côté des claviers est assez fourni avec pas moins de deux ordinateurs et une tablette. Nous aurons droit à une prestation d'environ deux heures, avec un Jamie qui alterne allègrement ses interventions entre guitare et claviers, et surtout un concert comportant de nombreux passages avec une teinte fortement métal. Le public réclamera pendant de longues dizaines de secondes un rappel, en vain.
Il y a GIAA sur album studio, que je trouve finalement assez calme et atmosphérique, et il y a GIAA sur scène qui déchaîne les décibels, ne comptant pas les litres de sueur et les cheveux fous, qui fait parler la poudre des cordes, donnant une teinte beaucoup plus énergique et très métal à leur musique. Presque deux approches différentes. Voilà aussi l'intérêt de voir sur scène les groupes que vous aimez (et les autres aussi). Ils ne sont peut-être pas là où vous les attendez (enfin si, sur scène, mais bon vous aurez compris !).
Voilà, ce premier jour est déjà fini. Un spectateur vient vers moi et me demande si et où les photos seront diffusées. Son pote italien, apparemment ancien chroniqueur et chasseur de concerts, me demande pourquoi je n'ai pas de pass, et me demande si j'ai un magnétophone. Il veut m'entraîner dans une interview à l'arrache de GIAA. "T'as pas besoin de préparer, ce qui est bien dans une interview c'est que tu peux parler de tout, de rien, tu peux refaire le monde !". Je décline poliment, je ne sais pas pourquoi mais je ne le sens pas. S'ensuit une discussion sur différents sujets notamment, "il n'y a plus rien de neuf", "tout a déjà été inventé", "le psychédélique foutraque c'est excellent". J'en reste un peu coi.
Un petit Apfelschorle pour finir la soirée et déambuler au hasard des personnes et des bacs, et je me rentre chez mon hôte allemand chez qui j'ai loué une chambre à prix modéré. Je ne serai pas mécontent d'entendre des voix sur scène demain.
Rédigé par : Laurent