Titres
Mathieu Torres [guitariste]
Artistes :
Stéphanie Artaud : pianos, paroles et chants
Hugo Lemercier : oude Solo + accompagnements (de 07,50 à 11,06)
Julien Langlois : saxophones, clarinettes, voix
Baptiste Segonne : batteries (exceptés sample et partie de Camille)
Camille Bigeault : batterie (de 21,43 à 24,12)
Laurent Avizou : guitare solo et accompagnement oreille droite (de 25,54 à 27,48)
Matthieu Paolini : flûte solo, flûtes, voix.
Yannick Cognet : flûtes + solo saxophone funky (de 38,43 à 39,37)
Mathieu Torres : composition, MAO, orchestrations, guitares, voix et paroles
Folk, classique, électro, oriental, rock, punk, world, progressif, RIO, psychédélique, l’Autopsie du dogme transcende les genres. Mathieu Torres, alias M’Z, ne craint pas les défis et ne recherche pas la reconnaissance commerciale pour sa musique, osant l’improbable titre de cinquante-cinq minutes et cinquante-cinq secondes, ‘l’Autopsie du dogme’.
Le dogme n’est plus, son crâne composé de racines repose sur l’humus de notre monde. Mais qu’en reste-t-il ? Le moins que l’on puisse dire, c’est que la musique composée par M’Z est tout sauf dogmatique, épousant tous les styles, genres et sous-genres en une longue tirade géniale et improbable que le chroniqueur redoute plus que tout : parler de pièces pop de deux à trois minutes demande peu d’efforts, traduire en mots un quart d’heure de rock progressif relève parfois du challenge, mais retranscrire près d’une heure de meltingpot instrumental demande un engagement considérable. Alors, comment procéder ? Commençons par le début, nous verrons si nous tiendrons jusqu’à la fin.
Les trente premières secondes patchwork résumeraient assez bien l’album. Mais il ne s’agit que de l’ouverture, bien d’autres aventures nous attendent. La flûte traversière de Mathieu Paolini sur une mélodie jazz folk se fait déborder par des sentences, des extraits de films, d’interviews, de sketches, déclamés en plusieurs langues et enchevêtrés comme les baguettes d’un Mikado : “Dieu est mort”, “Et nous n’aurons pas la paix sur terre tant que dieu occupera un seul coeur humain.”. Parle-t-on ici de religion ou bien de dogmatisme musical ? Un peu des deux en réalité.
Une orchestration classique à la Tchaïkovski prend la suite, bientôt supplantée par des motifs électros. Vers la sixième minute, une guitare jazzy latino prend le dessus sur des percussions balles de ping pong avant un changement de rythme qui amène un meddley world music virant à l’oriental, une saveur épicée qui perdure plusieurs minutes.
C’est un couplet rock, chanté en anglais par Mathieu, qui continue (nous en sommes déjà à plus du cinquième du morceau), prolongé par un instrumental relativement cinématique qui relance un nouveau couplet punk rock saupoudré de growl timide. A la seizième minute tout part en cacahuètes : “Toi plus nous, nous naviguons sur ce bateau” chante la voix alors que le saxophone de Julien Langlois et la guitare saturée s’emballent pendant quatre-vingt-dix secondes qui glissent vers un jazz feutré de nuit américaine où le saxo revient, dominant l’improvisation. “Ha oui ! J'adore le jazz ! Enfin, je le préfère quand même joué par des blancs…”. La musique poursuit son bout de chemin en notre compagnie façon fusion avant de redonner la parole au chant sur une mélodie cinématique.
“Y a du Jungle là ?”. Nouveau revirement électro rave qui nous conduit jusqu’à la trente-troisième minute fusionnelle à souhait et nettement plus à mon goût également, débordée par la voix d’une slameuse et ses chatons. Il s’agit ici du passage vocal le plus réussi de l’album. Une section qui s’achève dans un : “Ho mon dieu ! Ho, hum, ho !” à la connotation sexuelle peu équivoque. L’autopsie du dogme devient jazz pour quelques orgasmes instrumentaux, “Yes, ha yes !” puis nous plonge dans l’univers fantastique de Tim Burton.
Restent onze minutes au compteur, j’y suis presque. Onze minutes qui débutent électroniques à la Ozric Tentacles suivies du retour de Stéphanie au chant naturel et vocodé. Ce qui suit ressemble à de la musique symphonique pour cartoon et un patchwork rock, grunge, flamenco, électro, funk, hard rock, comme si Mathieu cherchait une fréquence à la radio. Il finit par tomber sur des ondes courtes, venues des Indes Orientales, de la musique traditionnelle métissée d'americana.
Nous sommes arrivé au bout de cinquante-cinq minutes et cinquante-cinq secondes de jazz, rock, funk, slam, jungle, classique, cinématique, folk, progressif, grunge, fusion, oriental, americana, bref de musique. Certaines transitions auraient pu être mieux amenées sans doute, et Mathieu n'excelle pas toujours dans le rôle du chanteur. Mais pour la musique, rien à dire, la palette jouée est tout simplement époustouflante. Avec l’Autopsie du dogme, M’Z égratigne l’industrie musicale bien pensante, donne un coup de pied dans la fourmilière culturelle religieuse. Mais l’album titre se révèle également un autoportrait multi facettes de l’artiste. Et paradoxalement, l’Autopsie du dogme s’écoute comme un album ‘normal’, imaginez simplement des blancs microscopiques entre chaque passage musical. Il suffit de ne pas être trop dogmatique.