Titres
La traversée de l’Atlantique comme une métaphore à la vie, Evergrey signe la troisième partie de la trilogie commencée en 2014 avec Hymns For The Broken. Tempêtes, vagues scélérates, mer d’huile, grains, accalmies, l’océan toujours changeant ressemble à notre existence tumultueuse faite d’amour, de haine, d’espoir, de bonheur et d’ennui.
Evergrey, emmené par Tom S. Englund, clôt Hymns For The Broken. Si le premier volume nous avait laissé dubitatifs, le second, The Storm Within, avait plus que titillé notre intérêt, et The Atlantic nous a captivé.
Guidé par les échos du sonar, le périple de nos cinq marins suédois débute, mystérieux. Très vite le metal progressif refait surface sur un océan déchaîné de basse et de guitares. Le chant et les claviers tempèrent les déferlantes de ‘Silent Arc’ le temps d’un refrain et les guitares de Tom et Henrik percent, comme des rayons de soleil, les nuages menaçants. ‘Weightless’ poursuit sur la lancée, poutrage, refrain mélodique et touches électro. La batterie cogne, les cordes grattent, ce qui n’empêche pas un long break apaisé après près de quatre minutes de ce tabassage.
La route suivie par Evergrey a fait ses preuves, metal des quarantièmes rugissants, refrains mélodiques tropicaux, une navigation dans une carène robuste et progressive bien connue de ces charpentiers du rock. Ils n’oublient pas la dose glamour metal, pour faire pleurer les marins tatoués à l’encre de Popeye avec ce ‘All I Have’ à la guitare délicieusement gilmourienne qui pardonnerait presque ce rhum coupé avec du sirop.
Lorsque l’on parle de l’Atlantique, impossible de ne pas évoquer ses mythes et mystères, comme celui de l’Atlantide, lieu secret, perdu, gisant sous l’océan. ‘A Secret Atlantis’ ravira les metalleux comme les progheads, une leçon technique à tous les pupitres doublée d’un chant rugueux à souhait. ‘The Tidal’ aux claviers krautrock électros offre une respiration iodée instrumentale avant ‘End Of Silence’ qui navigue du metal au mélodique sans vraiment trouver sa route.
Pas de doute, ‘Currents’ rappelle un survivor façon metal. Mais tellement de morceaux ont été composés depuis les années quatre-vingt qu’on leur pardonnera et, le titre possédant un joli final guitare-claviers, il serait dommage de le bouder. L’infra basse portée par le piano de Rikard sur les couplets de ‘Departure’ suffirait à rendre le morceau intéressant. Mais son écriture progressive, sa longue section chant piano, son refrain vendeur et les guitares, acoustiques comme électriques, devraient combler tout progueux qui se respecte, alors embarquons pour la traversée.
Mer, cris de mouettes, chant de sirène, voix off, ‘The Beacon’, entre électro et metal au refrain accrocheur pourrait briller de mille feux dans le brouillard des ondes FM. En version edit, amputé d’une minute, il aurait même ses chances sur les côtes françaises.
Evergrey sort la parka jaune de gros temps. ‘This Ocean’ renoue avec le metal prog musclé du début de l’album. La proue fend les murs d’eau glacée crêtée d’écume blanche, le navire se soulève et retombe, suspendu quelques secondes en apesanteur, s’enfonce dans l’océan, remonte et repart à l'assaut de la prochaine vague. Un final qui donne envie de repartir immédiatement en mer par gros temps.
Une traversée de la vie sans naufrage ni avarie, un peu bateau parfois sans doute, ‘The Atlantic’ ravira assurément les amateurs de metal progressif, de quoi faire de l’ombre assurément au prochain Dream Theater très attendu des fans.