Titres
Formation en 2006
Adrian Daleore [chanteur], Moritz Kunkel [guitariste], Thomas Moser [guitariste], Gérald Marie [clavier] depuis 2009, Christian Eckstein [bassiste], Konrad Gonschorek [batteur], Tilman Espert [clavier] jusque 2009
Sans être juge et partie, il se peut que votre serviteur connaisse trop les artistes de Deafening Opera pour parler en toute objectivité de leur album. Des rencontres de concerts, des amis communs, des repas partagés, des conversations passionnantes modifient inévitablement votre appréciation des personnes et votre jugement sur leur travail. Mais voilà, j’ai entre les mains let silence fall, leur quatrième album, et c’est à moi qu’il incombe la lourde responsabilité de le chroniquer.
Nous évoquions l’album en 2016 lors d’une interview, il tourne aujourd’hui sur ma platine. Des mois de travail pour ce sextuor franco-allemand, un enregistrement dans le Sud-Ouest de la France et la naissance de ce concept album de plus de soixante-dix minutes à l’artwork énigmatique.
Le livret, façon test de Rorschach - où je vois un visage et des nefs voguant sur l’océan (est-ce grave docteur ?) - s’ouvre en son milieu sur les photographies des visages semi-immergés des six musiciens. Un ensemble graphique inquiétant, comme l’histoire de cet album. Tout débute au bord d’une rivière. Un père explique à son fils la manière de conduire sa vie d’adulte (‘down the river’). Un homme découpe en deux son épouse volage avec une hache (‘sweet silence’) et la folie n’est jamais loin à force d’insomnies (‘amber light’). Une histoire tachée d’hémoglobine qui nous conduit aux frontières de la démence.
Depuis Blueprint (2013), le groupe a pris de l’assurance et affirmé son identité sur scène (Vanden Plas Chez Paulette en 2016). let silence fall sera assurément un important jalon dans leur carrière. Le groupe semble avoir trouvé l’équilibre entre influences et aspirations. Leur son s’est affiné, leur musique s’est enrichie, mutant de l’alternatif à un progressif aux riffs puissants illuminé de claviers et de guitares.
Un prologue classique et une ouverture en guise d’instrumentaux, un extrait d’opéra chanté par Adrian avec Katharina au piano (‘amber light coda’), deux titres acoustiques (‘as night and day collide’, ‘at the edge’) et sept autres pièces allant du très rock ‘man and machine’ à du metal progressif, l’album, aux diverses facettes, présente une forte unité narrative.
Si la conception et la composition de let silence fall révèlent l’évidente progression de Deafening Opera, le chant, lui, m’a quelque peu déçu. Adrian, à n’en pas douter, est un vrai chanteur (écoutez ‘man and machine’ ou ‘amber light coda’), il possède une voix lyrique magnifique, cependant certains titres donnent l’impression qu’il tente de formater ses cordes au rock plutôt que d’apprivoiser la musique et de lâcher la bride à sa voix. Une impression qui varie selon les morceaux (la douceur lui sied mal à mon goût) et qui s’efface toutefois au fil des écoutes.
De Blueprint à let silence fall, beaucoup de chemin a été parcouru par Deafening Opera. Le groupe possède aujourd’hui une réelle identité, un son reconnaissable, et leur album, malgré sa durée, ne souffre d’aucune longueur. Cependant, ce ne sera pas un coup de coeur. Claviers et guitares brillent (‘deafening overture’, ‘plus ultra’) là où le chant et la batterie pourraient gagner en qualité, et quelques pauses instrumentales auraient été les bienvenues, quitte à sortir deux CDs pour raconter l’histoire. Mais ne perdons pas de vue que la musique n’est pas leur métier, juste une passion qu’ils partagent dès que la vie leur laisse un peu de répit.
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